L'empirisme à l'empirisme - Surmonter les résistances contre la démonstration empirique de sa propre démarche psychanalytique
Résumé
«La psychanalyse et l’analyse de groupe ne survivront pas si nous ne sommes pas en mesure de démontrer ce que nous faisons et la qualité de notre travail » (notre traduction). Cette idée a constitué le début et la fin provisoire d’un difficile discours qui a duré dix ans (1990-2000) et auquel ont participé les membres des séminaires interrégionaux d’analyse de groupe (GRAS) formant des psychanalystes à l’analyse de groupe. Nous rapportons cette expérience ci-dessous, en réfléchissant aux aspects qui font que les analystes demeurent très ambivalents envers les études empiriques accompagnant les processus. Nous donnons priorité à l’analyse des résistances plutôt qu’au contenu. Du fait qu’en psychothérapie, la personne de l’analyste est part intégrante du traitement et de ses résultats, la situation est très différente de celle trouvée en médecine somatique où le contrôle continu des interventions médicales - ne serait-ce que par des analyses du sang - est considéré comme une évidence qui fait partie d’un canon éthique. A ceci s’ajoute peut-être le fait que nos membres ont tendance à dissimuler leur propre personne. Les expériences acquises lors d’un projet d’auto-recherche mené par un groupe de psychanalystes à Giessen dans les années soixante-dix semblent confirmer notre discours. Le problème fondamental relève du domaine complexe de la définition de la recherche et de la méthode adéquate à ce niveau. Il ne pourra finalement être résolu que par le biais d’une coopération continue entre analystes et spécialistes des méthodes. Et pourtant il faut bien que nous commencions avant que notre profession ne disparaisse ou ne soit interdite par les autorités - comme dans quelques villes des Etats-Unis -parce qu’elle n’aura pas réussi à apporter les preuves requises. On pourrait parler d’un « complexe de la mesure présomptueuse » qui conduit à ce que les psychanalystes ne se reconnaissent pas dans les résultats acquis. Pourtant, c’est souvent une certaine humiliation professionnelle qui se cache là dessous et que l’ambivalence à l’égard de la recherche tente de dissimuler: les résultats se reflètent sur le mauvais miroir, mais la recherche pourrait aussi mettre en évidence les défauts et les conflits des praticiens. Il y a aussi l’aspect comparaison avec des collègues et d’autres méthodes de thérapie, auquel s’ajoute le fait que la méthode si vénérée joue un rôle moins important (15% de la variance) que la relation thérapeutique (40%). Jürg Willi a signalé un aspect particulier: le laisser-aller psychothérapeutique qui fait que nous expliquons plus volontiers notre ambivalence envers la médecine somatique que notre rencontre avec l’inconscient. Cette inertie - qui n’est que trop humaine - ralentit considérablement le processus de recherche. Les analystes n’ont pas réussi à intégrer à leur formation l’apprentissage de la manière dont s’effectue une démonstration scientifique -
contrairement à ce qui se passe dans d’autres disciplines et peut-être parce qu’ils sont dépourvus d’une véritable identité. Ceci malgré que les ouvrages enseignant la théorie de la psychanalyse aient été rédigés en partie par des chercheurs empiristes tels Kächele et Krause. Les clients voudraient savoir ce qui se passe: il faut leur fournir une orientation dans la multiplicité des procédures psychothérapeutiques, collaborer à des recherches devant servir à bâtir une nouvelle perception (auto-critique) de notre discipline et diffuser les résultats en les expliquant de manière intelligible. La vision d’une recherche d’accompagnement intégrée est en partie réalisée. Il faut qu’elle inclue une éthique de la psychanalyse. Nous fournissons quelques brefs exemples concrets concernant la pratique de l’analyse de groupe et évalués sur la base du test de Giessen. Notons toutefois que l’étude menée par le GRAS utilise d’autres questionnaires encore. Seul le processus qui a démarré permettra de savoir quels groupes, parmi les 105 en cours, seront inclus dans l’étude. Nous avons en tout cas ajouté la branche «méthodes de recherche empirique» dans nos perfectionnements en analyse de groupe. Son enseignement est conçu de manière telle que ces méthodes se centrent sur une alliance démocratique avec les patients au lieu d’exiger une hiérarchie dans le cadre de laquelle les résultats sont classifiés et archivés. Si nous ne nous occupons pas de ce travail d’autres le feront pour nous - concernant la recherche d’accompagnement, il vaut mieux que l’initiative parte de nous, sinon nous devrons accepter de nous faire motiver de l’extérieur.
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