La guérison en tant que co-création – régulation réciproque dans le cadre du processus psychothérapeutique
Résumé
La répartition des rôles au sein de la dyade thérapeutique demeure asymétrique : le patient recherche de l’aide, le psychothérapeute tente de la lui donner. Pourtant nous comprenons maintenant de manière différente le processus thérapeutique puisque nous acceptons qu’au niveau interactionnel, les deux interlocuteurs fassent l’objet d’une régulation réciproque. Il n’y a jamais une seule personne qui agit. C’est pourquoi nous considérons qu’en psychothérapie, le champ intersubjectif forme un tout indivisible. Il y a symétrie totale au niveau de l’interaction entre deux êtres humains, même si les rôles continuent à être répartis sur un patient et sur un psychothérapeute.La manière dont nous concevons le processus a évolué sur un deuxième point, celui de la primauté accordée à la subjectivité. On n’avait pas porté suffisamment attention à la manière dont des dimensions subjectives influent sur le processus. Or, nous ne pouvons percevoir le patient qu’au travers de notre propre subjectivité. Toutes les idées, les mots, les ressentis ou les actions que le patient provoque en nous sont extrêmement subjectifs. Dès le moment où le thérapeute devient conscient du degré auquel il est influencé par sa propre subjectivité, il peut libérer ses perceptions de leurs aspects subjectifs pour revenir à une approche dialogique incluant une compréhension de ce qui, pour son patient, est la « vérité ». Nous modifions ce que nous observons en le soumettant à l’observation et cela provoque en nous des modifications - à ceci s’ajoute la dimension de la régulation réciproque. L’analyse des contenus de traitements reproduits mot à mot permet de démontrer d’une part l’importance de la régulation réciproque mais aussi, d’autre part, l’influence de la subjectivité du thérapeute sur le processus psychothérapeutique. Nous présentons deux exemples cliniques montrant comment les phénomènes de régulation réciproque et de primauté de la subjectivité façonnent le processus et permettant de saisir à quel point il est indispensable que la perception du thérapeute soit décentrée pour éliminer les blocages et maintenir le dynamisme du processus.
L’auteur décrit la psychothérapie en tant que démarche très personnelle, intime et idiosyncrasique, en tant qu’examen prolongé d’une rencontre unique durant laquelle on tente de définir et de transformer les points sur lesquels deux subjectivités se rencontrent. Dans ce sens, la thèse placée au centre de l’article est la suivante : la psychothérapie et la psychanalyse sont encore trop sujettes à une erreur conceptuelle - on considère qu’une personne en guérit une autre au lieu de comprendre que deux personnes découvrent ensemble la guérison. Au niveau asymétrique de la rencontre psychothérapeutique c’est le psychothérapeute qui est l’expert ; par contre, au niveau symétrique il s’agit d’un processus dans lequel des échanges entre humains co-créent une réalité. Nous ne plaidons pas en faveur de l’analyse mutuelle et ne rejetons pas l’aspect asymétrique. La psychothérapie continue à avoir la même visée - la guérison du patient -, mais la manière dont nous concevons le processus qui permet de l’atteindre a totalement changé : le thérapeute ne peut plus adopter une position extérieure privilégiée puisqu’il ne peut justifier son travail que parce qu’il est part intégrante du champ thérapeutique.
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Publiée
2009-01-01
Comment citer
Jaenicke, C. (2009). La guérison en tant que co-création – régulation réciproque dans le cadre du processus psychothérapeutique. Science psychothérapeutique, (1), 9–14. Consulté à l’adresse https://psychotherapie-wissenschaft.info/article/view/60
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