Une approche thérapeutique axée sur les types d'infractions dans le traitement de délinquants -conception, méthode et conditions structurelles du modèle zurichois PPD
Résumé
Dans les pays anglo-saxons, le traitement des délinquants se fonde sur des concepts de type cognitif et béhavioriste. Sachant qu'ils sont appliqués de manière trop rigide et trop unilatérale, des potentiels thérapeutiques demeurent souvent inexploités. En Europe, l'utilisation d'approches de type psychologie des profondeurs a conduit pendant longtemps à négliger les démarches axées sur des délits spécifiques. Le modèle PPD (service de psychiatrie et de psychologie / Psychiatrisch-Psychologischer Dienst, département de justice du canton de Zurich) élaboré à Zurich est une approche médico-légale de pointe qui permet d'évaluer les risques de manière professionnelle et d'offrir aux délinquants un large programme de thérapie préventive. Le PPD est un centre spécialisé intégré dans le système légal ; il est compétent pour prendre des décisions et assume ses propres responsabilités, ce qui a permis de créer le cadre nécessaire à la pratique d'une psychiatrie médico-légale innovatrice.
La philosophie a la base du concept PPD se fonde sur le principe suivant : un programme obligatoire d'interventions spécifiques aux différents délits et, en tant que complément, une thérapie adaptée aux problèmes de personnalité caractérisant les délinquants.
L'article présente cette approche, telle qu'elle est pratiquée dans le cadre du modèle zurichois.
Elle inclut entre autres des éléments de thérapie et des paradigmes qui ont une valeur plus globale et qui ne sont pas uniquement destinés au traitement des délinquants. Si, par exemple, l'auteur d'une infraction souffre d'un complexe de victime ou d'un syndrome de stress post-traumatique, sa thérapie ne se distingue en rien de celle qui serait offerte à une personne n'ayant commis aucun délit.
Les principes paradigmatiques qui sont appliqués sont, entre autres : une approche visant clairement à faire baisser les risques de récidive, une transparence maximale, l'ouverture, le respect, la promotion de l'autonomie individuelle (indépendance et responsabilité), l'interdisciplinarité et une attitude systématiquement pragmatique.
D'autres aspects fondamentaux sont en rapport avec des concepts associés au professionnalisme et à la volonté de pratiquer une psychologie utile. Par professionnalisme, nous entendons une volonté radicale de faire un travail efficace ; cet aspect se retrouve à tous les niveaux. Il faut donc à chaque fois poser la question de
savoir si un élément donné est utile (ou éventuellement nocif) du point de vue de l'accomplissement des objectifs mentionnés.
Ceci correspond à une attitude délibérément libre de toute influence philosophique ou religieuse, mais aussi de toute recherche de solutions faciles et de toute référence spécifique à des courants de psychothérapie. Ceci permet d'offrir un large éventail d'interventions tout en promouvant de manière créatrice l'évolution des conditions structurelles - là où ces développements peuvent être motivés et légitimés de manière professionnelle.
Du point de vue théorique, les techniques spécifiques utilisées se situent pour l'essentiel dans deux catégories : 1) amélioration de la capacité de l'individu à se contrôler et 2) réduction de la motivation à commettre des délits. Au niveau des éléments spécifiques à ce type de traitement, il faut mentionner : promotion de l'acquisition objective de données statistiques (élimination des statistiques non-officielles), reconstruction des infractions, élimination des distorsions cognitives, acquisition d'un « savoir-faire par rapport aux délits », meilleure définition du contexte permettant d'expliquer les infractions, élaboration de modèles en rapport avec leur cycle, amélioration de la compétence affective et de l'empathie avec le vécu des victimes, identification précoce des risques, travail utilisant l'imagination, ainsi qu'amélioration du contrôle de soi et de la gestion des pulsions.
Chacun des éléments mentionnés ci-dessus peut être intégré dans une thérapie par le biais d'interventions spéciales très variées.
Si l'on cherche à formuler un modèle simple pour expliquer les délits, on peut dire en bref qu'il y a déséquilibre entre la force d'une pulsion menant à l'acte et la capacité du délinquant à gérer et à contrer cette pulsion. C'est pourquoi toute thérapie visant la prévention des infractions doit permettre d'améliorer la manière dont les délinquants gèrent leurs pulsions et/ou de les démotiver à passer à l'acte. Pour illustrer l'aspect pratique de notre concept, nous présentons des exemples en rapport avec les éléments «reconstruction du délit» et «travail sur le délit».
L'auteur n'est absolument pas d'accord avec la thèse largement répandue en Europe considérant que le traitement des délinquants n'est pas un domaine spécialisé de la psychothérapie. Ces thérapies, mais aussi la prévision des risques, deviennent beaucoup plus efficaces lorsqu'elles se fondent sur des concepts spécialisés et différenciés.
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