Psychothérapie et salutogenèse : une approche axée sur les ressources dans la perspective de la psychothérapie positive

Auteurs

  • Hamid Peseschkian

Résumé

Notre monde a changé. Le cadre dans lequel se déroule la « rencontre thérapeutique » entre thérapeute et patient a également évolué. Aujourd'hui, à l'époque des sociétés multicul-turelles et de la globalisation, on peut donc considérer que l'ère des psychothérapies monoculturelles et centrées sur les aspects pathologiques touche à sa fin. Nombreux ont été ceux qui, ces dernières années, ont demandé que la santé soit perçue en tant que système holistique reposant sur les ressources de l'individu. Les critiques adressées à l'offre fournie actuellement par le système de santé concernent spécifiquement le fait que ce dernier a adopté une approche de type pathogenèse. Selon le modèle biomédical, la maladie est le produit d'un déficit ; ce modèle pourrait être élargi pour inclure également des aspects psychosociaux. Selon cette approche, la santé est conçue comme quelque chose de complexe et de multidimensionnel, une priorité étant attribuée à la capacité qu'ont les patients de s'apporter un soutien à eux-mêmes et de se prendre en charge. Traditionnellement, la psychiatrie et la psychothérapie avaient fondé leur image de l'homme sur la psychopathologie. Elles s'intéressaient aux maladies et aux troubles. Les traitements visaient à éliminer la maladie, comme le fait le chirurgien lorsqu'il fait l'ablation d'un organe malade. Cette approche met l'accent sur les symptômes ; elle se fonde sur une image réductionniste et mécaniste de l'humain qui, bien que datant du XVIIe siècle, a influé durablement sur la médecine et l'influence encore aujourd'hui. Par contraste et dans un nouvel esprit, la notion de salutogenèse a été décrite par Aaran Antonovsky. Elle est un modèle parmi d'autres, mais peut servir d'exemple lorsqu'on envisage un élargissement du concept de santé. Nous la présentons ci-dessous du point de vue de ses rapports avec la psychothérapie. Cette conception est utilisée avant tout au niveau de la promotion de la santé, cette dernière n'étant pas considérée comme un objectif mais comme un moyen qui permet aux individus de façonner de manière positive leur vie personnelle et sociale. Il s'agit de renforcer des compétences, ainsi que le sentiment d'être responsable pour soi-même et d'être capable d'améliorer la situation -ceci s'appliquant à des individus comme à des groupes.

L'influence d'une approche psychothérapeutique axée sur les ressources est en étroit rapport avec l'image d'eux-mêmes qu'ont les professionnels. La perspective de type salutogenèse est un défi lancé à la psychothérapie classique. Elle nous force à débattre des aspects associés à la réactivation des ressources du patient et à notre image de l'humain ; elle nous incite aussi à définir des conceptions de la santé et de la maladie qui sont adaptées à notre époque. Nous devons alors prendre en compte le contexte existentiel et l'environnement de nos clients, mais aussi réévaluer nos stratégies de traitement et nos objectifs. L'approche dans laquelle il s'agit pour le client de surmonter son propre passé doit être complétée d'une perspective axée sur l'avenir. Le concept de salutogenèse est utile au niveau de la psychothérapie et de ses praticiens dans le sens où il incite les différents courants à réévaluer leurs propres théories et concepts. Les travaux de recherche effectués à ce jour montrent que l'activation des ressources du patient contribue énormément à améliorer l'état de ce dernier et qu'elle joue un rôle central.

Les thérapies humanistes se positionnent très près du concept décrit ici. La psychothérapie positive développée depuis 1968 par Nossrat Peseschkian en Allemagne peut être considérée comme une approche de type humaniste, incluant une perception psychodynamique des conflits, ainsi que des éléments de type thérapie du comportement. Elle se centre sur les ressources du patient, donc d'abord sur les possibilités à sa disposition, la notion de maladie étant secondaire. En plus d'autres aspects, son image de l'humain est très proche de celle élaborée par la psychothérapie humaniste ; elle considère par exemple que l'être humain a la capacité d'évoluer car il serait vain de pratiquer la thérapie sans que la démarche soit soutenue par cette conviction. De ceci découlent quelques exigences à poser au travail thérapeutique, au niveau des méthodes appliquées comme à celui du psychothérapeute (et de sa formation). Enfin, il faut exiger que les praticiens mènent une réflexion sur les données scientifiques acquises par rapport aux effets des traitements. Ce qui signifie que ce n'est pas aux méthodes qu'il faut accorder priorité, mais à des approches permettant de soutenir le développement des potentiels dont disposent les clients.

Ce qui a été dit ci-dessus a des conséquences au niveau des compétences et de la formation des thérapeutes. Si la psychothérapie doit, à l'avenir, mieux prendre en compte des aspects culturels liés à la salutogenèse, il faut que les futurs thérapeutes reçoivent une formation adéquate à ce niveau. Il faut aussi qu'ils développent leurs compétences dans ce domaine. Ceci signifie, par exemple, qu'en cours de formation plus d'attention soit portée à la relation thérapeutique. Il faut considérer comme essentiel que les «jeunes» psychothérapeutes développent leur capacité relationnelle car c'est sur celle-ci que se fondent toutes les autres compétences et techniques.

Les psychothérapeutes ont toujours une responsabilité envers la société et ceci s'applique encore plus lorsque cette dernière se trouve en mutation. Notre société globale est à la recherche d'une nouvelle identité et d'une nouvelle perception de l'être humain.

Les approches et idées développées par les psychothérapeutes peuvent apporter une contribution importante dans le sens où, en dehors de leurs aspects scientifiques, elles offrent une image de l'individu et de la société et peuvent contribuer à atténuer les problèmes sociaux. Il est peut-être temps que les luttes entre courants thérapeutiques cessent et que nous nous tournions vers les besoins de nos patients et de notre société. Les psychothérapeutes s'affrontent à de nombreux aspects des comportements humains et c'est pourquoi ils ont une grande responsabilité sur le plan social - ils l'ont trop peu assumée jusqu'à maintenant.

Biographie de l'auteur

Hamid Peseschkian

Dr. med. habil. Hamid Peseschkian, Jahrgang 1962, Facharzt für Neurologie, Psychiatrie und Psychotherapie in eigener psychotherapeutischer Privatpraxis. Geschäftsführer der Wiesbadener Akademie für Psychotherapie. Vorsitzender des Internationalen Zentrums für Positive Psychotherapie. Dozent und Lehrtherapeut für Psychotherapie und Psychosomatische Medizin. Visiting Professor an der Northern State Medical University in Archangelsk, Russland. Lehrbeauftragter an der Universität Mainz.

Korrespondenz: Dr. med. habil. Hamid
Peseschkian, Wiesbadener Akademie für
Psychotherapie, Langgasse 38–40,
65183 Wiesbaden, Deutschland

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Publiée

2004-01-01

Comment citer

Peseschkian, H. (2004). Psychothérapie et salutogenèse : une approche axée sur les ressources dans la perspective de la psychothérapie positive. Science psychothérapeutique, (1), 16–25. Consulté à l’adresse https://psychotherapie-wissenschaft.info/article/view/407