Entre la découverte d’un sens à l’existence et le burn-out : une étude empirique fondée sur l’analyseexistentielle

Auteurs

  • Anton Nindl
  • Alfried Längle
  • Erich Gamsjäger
  • Joachim Sauer

Résumé

L'objectif de l'étude est de découvrir les rapports liant le sentiment que l'existence est dépourvue de sens et les différents aspects du burn-out, mais aussi de mettre en évidence ses rapports avec différents troubles psychosomatiques et traits de la personnalité.

Il est de fait que l'on emploie les termes suivants pour décrire les symptômes d'un grave burn-out : « attitude négative envers la vie », « sentiment de désespoir », « sentiment de futilité», « tendances suicidaires » et « désespoir existentiel » ; mais on ne prête que peu d'attention aux rapports entre le burn-out et la question du sens de la vie. Längle (1997) a entrepris une tentative dans ce sens en expliquant les origines du burn-out sur la base de l'analyse existentielle (une méthode de thérapie appelée aussi logo thérapie; NdT) et en définissant plusieurs phases: la situation qui, à la base, le provoque est une « attitude non-existentielle » associée la plupart du temps à un déficit au niveau des aspirations fondamentales sur le plan personnel et existentiel. La personne qui a cette attitude aspire à une vie comblée, mais ne prend pas en compte les conditions de l'existence. Elle obtient un sens et un amour illusoires en se fondant sur des motifs définis par autrui, mais elle demeure subjectivement « en manque » ce qui lui fait adopter dans sa vie une attitude réductionniste et fonctionnelle. Elle n'a pas en elle ce sentiment d'adhérer à ses actions et à la vie qui motive les êtres humains. Ce manque conduit à un sentiment de vide, à l'apathie et au désespoir tels que les décrit Freudenberger (1982) en tant que constituant le stade ultime du cycle de burn-out. Avec notre étude, nous voulons démontrer empiriquement les rapports entre sentiment que l'existence n'est pas futile et le burn-out en nous fondant sur une approche de type analyse existentielle appliquée à un échantillon d'enseignants travaillant à Salz-bourg, en Autriche.

Le degré de satisfaction existentielle a été mesuré avec l'échelle de Längle et al. (2000) et celui de burn-out avec l'inventaire de burn-out de Gamsjäger (1994) - une forme élargie du MBI de Maslach et Jackson (1986). Par ailleurs, nous avons utilisé l'EPI (Eggert 1974) pour mesurer les tendances à la névrose et l'extraversion des répondants, ainsi que le BEB (Kasielke et al., 1974) pour évaluer leurs troubles psychiques. Des corrélations ont été calculées concernant l'intensité de la motivation existentielle, les valeurs en rapport avec les facteurs burn-out et intensité globale du burn-out, ainsi que les données en rapport avec les troubles psychosomatiques et l'importance des tendances à la névrose et de l'extraversion.

Le SPSS 10.0 a servi effectuer les calculs.

Concernant les rapports entre plénitude de vie et des dimensions spécifiques du surmenage, nous obtenons des corrélations négatives significatives entre les valeurs enregistrées sur l'échelle de Längle et dans l'inventaire de Gamsjäger -ceci s'appliquant à toutes les échelles secondaires ainsi qu'à l'ensemble des tests chez tous les enquêtés. Cela signifie qu'il existe un rapport démontré statistiquement entre l'intensité du burn-out et la gravité du manque de plénitude existentielle.

Des corrélations élevées ont été enregistrées au niveau de l'épuisement affectif et de toutes les valeurs situées sur l'échelle existentielle.
Les rapports entre les valeurs obtenues sur cette dernière et les réponses à un questionnaire sur les symptômes indiquent qu'il y a une importante corrélation entre les valeurs concernant la personnalité, l'existence et l'ensemble des tests de l'échelle existentielle d'une part, et les troubles somatiques, fonctionnels et psychiques d'autre part.

Les valeurs enregistrées sur l'échelle existentielle et les résultats de l'EPI concernant la dimension « personnalité avec tendance à la névrose » manifestent une corrélation fortement négative très significative. Par contre, il n'a pas été possible de démontrer des corrélations significatives entre le sentiment de plénitude existentielle et l'extraversion, l'échelle secondaire « liberté» mise à part.

Les résultats empiriques présentés ici démontrent qu'il existe un rapport (qui peut être prouvé statistiquement) entre l'épuisement/le surmenage et le manque de plénitude existentielle. Les rapports étroits constatés entre la tendance à la névrose et le burn-out confirment les résultats acquis par d'autres chercheurs, dont Pines et al. (1981). Maslach souligne lui aussi que les personnes ayant une image de soi négative perçoivent autrement les situations pouvant provoquer un burn-out et qu'elles les gèrent moins bien.

Le fait que les processus de burn-out vont s'accompagner de nombreuses réactions psychosomatiques conforte l'idée que l'être humain forme une totalité - corps, âme et esprit. Les symptômes mentionnés sont très proches de ceux de la neurasthénie tels qu'ils sont décrits dans l'ICD-10. Notre travail confirme aussi la notion que le burn-out est un syndrome de surmenage incluant un épuisement affectif et somatique, ainsi qu'un sentiment de vide psychique et de manque d'orientation. En résumé : il est clair qu'il existe un rapport entre l'absence de sentiment que l'existence a un sens et le burn-out. Alors qu'un cinquième des enseignants ayant participé à l'enquête déclarent ne pas être comblés par la vie, le tiers d'entre eux souffrent de problèmes plus ou moins importants de type burn-out, incluant des handicaps psychiques ayant des conséquences importantes et toute une série de troubles divers. Ces personnes ont besoin d'un soutien qui pourrait leur être apporté dans une certaine mesure à titre de prévention dans le cadre de cours innovateurs, mais qui doit absolument s'accompagner d'une supervision de leur activité professionnelle par des spécialistes. Les enseignants soumis à un stress très important ont besoin de stratégies élaborées pour leur organisation ou leur institution, mais il faut avant tout leur offrir des mesures qui permettent de les soulager dans leur situation spécifique. Il faut développer des stratégies leur permettant d'être moins pressés par le temps, de déléguer et de répartir les responsabilités, mais aussi de fixer des objectifs réalistes. Lorsqu'un soutien de type analyse existentielle est offert à des personnes souffrant de burn-out, il s'agit d'approfondir la démarche en transférant les priorités thérapeutiques loin des conditions extérieures et vers l'attitude individuelle envers l'existence ainsi que vers la recherche d'un sens dont la structure permet d'orienter la vie à un niveau subjectif. Aider l'individu à disposer d'une authentique attitude existentielle lui permet de faire évoluer sa personnalité de manière décisive -même lorsque cette démarche débute parce qu'il souffre d'un burn-out.

Bibliographies de l'auteur

Anton Nindl

Dr. Mag. Anton Nindl, Klinischer und Gesundheitspsychologe, Psychotherapeut (EL), Diplompädagoge, Lehrtherapeut (GLE), Leiter des Institutes für Existenzanalyse und Logotherapie in Salzburg, Existenzanalytiker in freier Praxis.

Korrespondenz: Institut für Existenzanalyse und Logotherapie, Thumegger Bezirk 7/1, 5020 Salzburg, Österreich

Alfried Längle

Dr. med. Dr. phil. Alfried Längle, Arzt für Allgemeinmedizin und psychotherapeutische Medizin, Klinischer und Gesundheitspsychologe, Psychotherapeut (EL), Lehrtherapeut (GLE), Präsident der Internationalen Gesellschaft für Logotherapie und Existenzanalyse (GLE-I), Wien.

Erich Gamsjäger

Dr. Mag. Erich Gamsjäger, Psychologe, Diplompädagoge, Psychotherapeut (VT), Studien zu Burnout bei Lehrern

Joachim Sauer

A.o. Univ.-Prof. Dr. Joachim Sauer, Klinischer und Gesundheitspsychologe, Psychotherapeut (KP), Lehrtherapeut, Institut für Psychologie, Universität Salzburg

Téléchargements

Publiée

2006-07-01

Comment citer

Nindl, A., Längle, A., Gamsjäger, E., & Sauer, J. (2006). Entre la découverte d’un sens à l’existence et le burn-out : une étude empirique fondée sur l’analyseexistentielle. Science psychothérapeutique, (3), 153–159. Consulté à l’adresse https://psychotherapie-wissenschaft.info/article/view/320