Jusqu’où le modèle biopsychosocial de l’homme est-il utile en psychothérapie?

Auteurs

  • Franz Resch
  • Kerstin Westhoff

Résumé

Le modèle biopsychosocial de l'homme est considéré comme un système intégral permettant d'expliquer les troubles psychiques dans le sens où, en l'appliquant, on peut identifier les éventuelles influences réciproques de facteurs variés mis en évidence par des recherches dans les domaines des sciences naturelles, sociales et culturelles. Il est pourtant évident que, de par sa nature, ce modèle ne peut pas être formulé clairement et sans contradictions : il n'existe pas de langage scientifique unique permettant de formuler toutes les connaissances acquises au sujet de l'être humain. Le problème de la différence entre événements et vécus ne peut pas être éliminé.

Notre savoir et nos interventions en tant que psychothérapeutes se fondent sur différentes épistémologies relevant des sciences naturelles et sociales et sur une perspective herméneutique. Nous ne disposons pas d'une métathéorie concise dans laquelle le modèle biopsychosocial pourrait être intégré. Nous ne prenons pas nos décisions thérapeutiques en nous fondant sur une théorie, mais le faisons sur la base d'une expérience personnelle et complexe de la pratique qui nous permet d'évaluer différents aspects. Ceci n'est pas satisfaisant d'un point de vue scientifique. Le contexte dans lequel des décisions sont prises en rapport avec différents aspects théoriques relevant de la biologie, de la biographie et de l'environnement social est individuel et issu de l'expérience personnelle. Les décisions thérapeutiques sont « experience based ». Elles sont issues d'un apprentissage fondé sur l'expérience, sur l'expérience de soi et sur la supervision. La médecine fondée sur les preuves (evidence-based medicine) nous fournit des outils, mais elle ne peut pas être substituée à un processus de décision concernant un cas individuel, ni à une évaluation mûrement réfléchie de différents symptômes. Même si certaines lignes directrices nous permettent de prendre en compte parallèlement des aspects appartenant aux domaines biologique, psychique ou social, la manière dont nous décidons de mettre en œuvre certaines interventions demeure individuelle. Le thérapeute dispose d'une liberté d'interprétation très grande mais il en assume également la responsabilité. Même une thérapie menée dans les règles peut impliquer des aspects nuisibles si l'on se trompe au moment de prendre des décisions différenciées. À ce niveau, le moment de l'intervention joue un rôle important. Le thérapeute qui fait ce qui est, en principe, juste au mauvais moment du processus provoquera des réactions peu favorables à ce dernier ; par exemple, il n'est pas possible de tenter une restructuration cognitive chez un patient anorexique tant que le poids de ce dernier est très bas. Il est d'autre part important de sélectionner le bon niveau d'intervention. Selon la manière dont on choisit de centrer la thérapie ou de fixer des priorités, on gérera une crise psychique de manière très variable : faut-il, par exemple, maintenir la démarche avec un enfant au niveau des entretiens, ou d'abord lui prescrire des médicaments, ou parler avec ses parents ou prévoir qu'il change d'école ? Les choix effectués auront des conséquences plus ou moins utiles. Il faut porter une attention particulière au risque d'escalade et demeurer centré sur le ici et maintenant de la relation située au centre de la thérapie.

Les interventions thérapeutiques se font dans un contexte impliquant des tensions au niveau de faits concrets vécus et interprétés subjectivement. Les traitements psychothérapeutiques doivent également se fonder sur la philosophie et l'herméneutique. Si l'on devait réussir à concilier différents langages en un seul modèle biopsychosocial, il faudrait le faire en respectant les différences entre les différents champs de connaissance impliqués. Le respect mutuel manifesté à l'égard les uns des autres par des thérapeutes issus de différents courants et par des scientifiques pourrait représenter un paradigme utile pour le respect que manifeste le thérapeute à l'égard de ses patients. C'est dans le contexte de ce type de communication que la thérapie doit se situer.

Bibliographies de l'auteur

Franz Resch

Franz Resch, Prof. Dr. med., Ordinarius und ärztlicher Leiter der Klinik für Kinder- und Jugendpsychiatrie der Universität Heidelberg, geb. 1953 in Wien, Ausbildung zum Facharzt für Psychiatrie und Neurologie und zum Facharzt für Kinder- und Jugendneuro-psychiatrie an der Universitätsklinik Wien, 1993 Berufung nach Heidelberg, 2002/2003 Präsident der Deutschen Gesellschaft für Kinder- und Jugendpsychiatrie, Psychosomatik und Psychotherapie. Präsident der Deutschen Liga für das Kind. Wissenschaftliche Schwerpunkte: Entwicklungspsychopathologie, klinische Emotionsforschung, Psychosen des Jugendalters.

Korrespondenz:
Klinik für Kinder- und Jugendpsychiatrie, Zentrum für Psychosoziale Medizin, Universitätsklinikum Heidelberg, Blumenstraße 8,
69115 Heidelberg, Deutschland

Kerstin Westhoff

Kerstin Westhoff, lic. phil. Psychologin FSP, geb 1964 in Dresden, 1985 Studium an der Karl-Marx-Universität Leipzig, Fachrichtung Biochemie, 1990 Studium der klinischen Psychologie an der Universität Basel, 1997 Lizentiat in klinischer Psychologie an der Universität Basel. Ausbildung in psychoanalytisch orientierter Psychotherapie seit 1995. Psychologin an der Kinder- und Jugendpsychiatrischen Universitätsklinik Basel und Psychoonkologin des Kinderspitals Basel

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Publiée

2006-10-01

Comment citer

Resch, F., & Westhoff, K. (2006). Jusqu’où le modèle biopsychosocial de l’homme est-il utile en psychothérapie?. Science psychothérapeutique, (4), 186–192. Consulté à l’adresse https://psychotherapie-wissenschaft.info/article/view/308