Économisme en thérapie – une porte ouverte aux abus ?
Résumé
Je décris le phénomène qui fait que la santé publique est devenue un domaine perçu en termes économistes. Ceci n'a pas seulement des effets sur sa fonction curative : aujourd'hui le niveau de la prévention est également touché. Si l'on considère l'évolution du système de santé du point de vue de la logique du marché, on doit poser une question d'ordre économique : la santé est-elle devenue un objet d'investissement prioritaire pour l'individu et ne se transforme-t-elle pas en marchandise vendue sur le marché sous forme de produits et de prestations ?La manière dont la santé est devenue un facteur économique modifie radicalement l'image de la maladie et de la santé. Cette dernière peut être acquise ou accrue et la maladie n'est plus due à une fatalité regrettable puisqu'elle peut être vue comme un défi à travailler sur soi-même ou à suivre un traitement psychothérapeutique qui permettra de lutter avec tous les moyens à disposition contre les imperfections somatiques et psychiques. La manière radicale dont s'axe maintenant la santé, l'idée qu'elle peut être perfectionnée et « acquise moyennant paiement » ont des conséquences importantes : la thérapie devient une composante normale du quotidien et parallèlement les attentes formulées à son égard croissent ; on demande de l'efficacité, etc.
Suivant les lois du marché, il devient possible de mettre en concurrence les produits diffusés par les différentes méthodes de thérapie ; ce sont les conditions du marché qui règlent l'offre et la demande. C'est dans ce sens que l'auteur montre que, par exemple, certains diagnostics et certaines méthodes peuvent être à la mode pour une période donnée, comme en fournit l'exemple de la thérapie des traumatismes.
Les contraintes faisant que les aspects économiques deviennent prioritaires - c'est le cas en psychothérapie aussi - ont pour conséquence qu'il faut vendre sa propre marchandise, si possible avec bénéfice, à des clients qui sont disposés et aptes à en payer le prix. Puis, dans une seconde étape, il s'agit de s'attacher ses clients pour aussi longtemps que possible. Ceci peut être indispensable à la survie financière des thérapeutes, mais aussi lucratif : on peut présenter sa propre offre en disant que les personnes ayant besoin d'aide en ont absolument besoin et que l'offre personnelle correspond à leurs besoins - donc qu'il faut qu'elles restent en thérapie et ne changent surtout pas de thérapeute.
Il faut que les clients et les patients apprennent à devenir une clientèle autonome. Lorsqu'il assume ce rôle, le client/patient va aussi chercher à découvrir comment il peut obtenir la marchandise de son choix avec un bon rapport prix-qualité. Cet aspect n'existait pas auparavant en psychothérapie : en assumant un nouveau rôle, le client acquiert la possibilité de décider lui-même du déroulement de son traitement. Je traite dans l'article des effets de ce contexte marchand sur la relation thérapeute-patient et en particulier du dilemme dans lequel se trouve le thérapeute : il doit être à la fois participant à droits égaux à cette économie de marché et, en même temps, assumer une relation impliquant une aide spécifique et un besoin de soutien.
D'autre part, les évolutions vers une perception économiste de la psychothérapie peuvent favoriser les abus (sexuels).
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Publiée
2007-01-01
Comment citer
Duttweiler, S. (2007). Économisme en thérapie – une porte ouverte aux abus ?. Science psychothérapeutique, (1), 28–31. Consulté à l’adresse https://psychotherapie-wissenschaft.info/article/view/136
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