« Je ferai tout pour toi, mais ne me quitte pas ! » - Burnout et agency

Résumé

La promesse sous-jacente à l’agency - tout faire pour garder le contact - conduit forcément l’individu qui a choisi cette stratégie à glisser progressivement vers le burnout.

Tenant compte des connaissances acquises par la recherche sur l’attachement et choisissant un point de vue psychodynamique de la psychothérapie, l’auteur de l’article considère l’agency comme une stratégie existentielle centrée sur l’objet et décrit la « chaîne logique » qui conduit de la nécessité de se construire malgré un conflit fondamental à l’adoption d’une stratégie de ce type.

Lorsque la mère et l’enfant ne sont pas « compatibles », ce dernier structure son comportement de manière à améliorer l’ajustement de la relation. En fait, l’enfant s’adapte à la mère. J. L. Rosenberg et B. Kitaen Morse utilisent le terme d’agency pour désigner cette stratégie, y compris la promesse qu’elle implique.

Les deux formes de peur, être abandonné ou ne pas être aimé, ne sont pas le produit du même conflit fondamental : la crainte de l’abandonnement est issue du fait qu’au niveau du développement, aucun lien sécure n’a été établi ; la peur de ne pas être aimé naît plus tard, au moment où l’enfant doit devenir autonome. En utilisant la stratégie de l’agency, l’enfant se centre sur l’objet et néglige les intérêts du Soi - la stratégie correspond donc pas simplement à un comportement, elle a une dimension existentielle puisqu’elle sert à recouvrir un conflit fondamental. L’individu n’ayant pas réussi à accomplir certaines étapes de sa construction. il souffre d’une forme existentielle d’anxiété.

C’est pourquoi la stratégie adoptée ne peut pas être éliminée par une démarcation par rapport à la mère ou plus tard à d’autres personnes ; l’individu en souffrance doit redécouvrir son Soi et en tenir compte au moment d’établir une relation - il doit deuenir autonome dans le cadre de cette dernière.
Par ailleurs lorsque tous les efforts qu’il entreprend ne sont pas « récompensés » et que son énergie s’épuise, ou lorsqu’il ne réussit pas à établir une relation convenable avec l’être aimé, c’est-à-dire lorsque sa stratégie ne sert plus à rien, celle-ci devient narcissique.

D’un point de vue théorique, agency et la stratégie correspondant au schéma altruiste décrit par G. Rudolf sont pratiquement identiques. Rudolf considère qu’en règle générale, l’individu mettant en œuvre la stratégie en question est névrosé, mais que la structure de sa personnalité est suffisamment stable. En réalité, la personne qui met en œuvre une stratégie de type agency va se voire confrontée à de violents conflits au moment où le narcissisme va l’emporter.

Du point de vue de la psychothérapie intégrative corporelle selon J. L. Rosenberg et Beverly Kitaen Morse, mais aussi de la psychothérapie structurelle, le travail doit se référer à la théorie polyvagale du système nerveux autonome (S. Porges). La thérapie sera guidée par la phénoménologie de la perception (somatique et émotionnelle), en séparant clairement l’interprétation des contenus perçus des phénomènes somatiques et émotionnels.

Le travail par la respiration (« Strukturelle Psychotherapeutische Atemarbeit »/SPA) constitue un moyen thérapeutique utile dans le contexte qui nous intéresse ; il permet d’obtenir de bons résultats, car il permet d’atteindre (par la respiration) un niveau profond des processus psychosomatiques. Dans son cadre, le client et le thérapeute peuvent observer les phénomènes corporels et relationnels, identifiant ainsi les cycles du système nerveux autonome qui sont touchés.

Lorsqu’une thérapie a permis de mieux gérer le problème que pose une stratégie de type agency, il devient possible de reformuler la phrase servant de titre à l’article en un : «Je fais volontiers quelque chose pour toi,je me sens bien lorsque je suis avec toi, mais je ne veux pas me laisser exploiter dans notre relation ou renier mon moi le plus intime ».