Critères servant à diagnostiquer l'état de stress post-traumatique et leurs conséquences pour la pratique thérapeutique
Résumé
Les personnes ayant subi un traumatisme très grave ont passé par un vécu exceptionnellement menaçant ou catastrophique ayant provoqué certaines réactions psychophysiologiques et des modifications caractéristiques de la personnalité (cf. DSMIV et ICD 10/F43.1). C’est sur cette base qu’un état de stress post-traumatique est diagnostiqué. Selon le DSM IV (cf. Fischer et Riedesser, 1998) il faut distinguer trois catégories de symptômes: ceux qui sont associés à la reviviscence répétée et incontrôlée de l’événement traumatique, ceux qui sont caractérisés par une “anesthésie psychique” et par l’évitement des comportements pouvant réveiller des souvenirs, ainsi que ceux accompagnant un état prolongé d’hyperactivité neurovégétative.
Durant la phase aiguë, l’individu traumatisé a besoin en priorité de retrouver un sentiment de sécurité et de contrôle, ceci s’appliquant tout d’abord au contexte de la réalité extérieure et du domaine psychosocial. Pour qu’il retrouve un sentiment de sécurité intérieure, il est important que le traumatisé comprenne que ses réactions post-traumatiques sont normales et que son état peut s’améliorer. Il faut aussi que les interventions thérapeutiques soient conçues de manière telle qu’elles renforcent son vécu en tant que personne autonome et compétente. Au niveau du transfert, ce sont des rapports puissance/impuissance, domination/soumission qui sont répétés et mis en scène. Le thérapeute est alors alternativement perçu comme sauveteur ou comme persécuteur — avec souvent un passage soudain de l’un à l’autre. Dans le cadre du contre-transfert, il arrive fréquemment que celui-ci soit “contaminé” par le traumatisme et qu’il réagisse en faisant l’expérience des mêmes symptômes que la victime: impuissance et colère, dégoût, peur, sentiment de culpabilité, s’accompagnant d’une tendance prononcée au refoulement. L’intensité des aspects psychodynamiques soulevés par le travail avec des traumatisés fait que l’intervision et la supervision y jouent un rôle particulièrement important.
Dans ce contexte, une attitude d’abstinence morale est contre-indiquée. Il faut au contraire que le/la thérapeute formule clairement “un strict non” aux infractions qui ont été commises contre les droits de l’homme. Le meilleur soutien qui peut être apporté aux traumatisés est celui d’un “pacing and leading” thérapeutique, d’une démarche comportant une juste mesure il la fois d’empathie et de structuration, ceci en fonction des ressources il disposition des clients. Des méthodes non- ou para-verbales sont d’une utilité particulière, ainsi que la participation au traitement des co-victimes ou de la famille.
Lewis Herman (1993) distingue trois “étapes de guérison”: 1. retrouver la sécurité, 2. se souvenir et faire son deuil et 3. se reconnecter. Chacune de ces trois phases implique des priorités et objectifs thérapeutiques spécifiques. Dans un premier temps il s’agit de gérer le monde intérieur et extérieur “ici et maintenant” - objectif: rétablissement d’un sentiment de sécurité intérieure et extérieure et renforcement du moi par des formes d’intervention thérapeutique mettant l’accent sur le soutien et la recherche de solutions. Une fois que son moi est redevenu suffisamment stable, l’individu est il même de s’affronter consciemment il ce qui s’est passé et d’effectuer un travail de deuil en rapport avec les nombreuses pertes qu’il a subies; ici les interventions thérapeutiques sont de type mise en lumière et confrontation. Finalement, durant la phase de reconnection le traumatisé réfléchit il sa propre identité, il ses priorités et objectifs existentiels et il son avenir; la thérapie se centre alors sur l’interprétation et - c’est important - sur la prévention d’une éventuelle rechute.
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