Les bases psychodynamiques de la psychiatrie communale

Auteurs

  • Rudolf Heltzel

Résumé

L’auteur est psychiatre et, se référant à son expérience dans le service de sociopsychiatrie d’une grande ville située au nord de l’Allemagne, il tente de promouvoir des rapprochements entre psychiatrie et psychanalyse. Sachant qu’en Allemagne, il existe une obligation d’offre en psychiatrie dans le secteur communal, la question qui se pose est la suivante: comment caractériser une attitude de type fondamentalement psychodynamique, de manière telle qu’elle soit utile à un psychiatre travaillant dans ce secteur? L’auteur esquisse les éléments constitutifs de cette approche et les concrétise par rapport au traitement d’un patient souffrant d’un trouble narcissique de la personnalité de niveau borderline. Il se réfère aux récents développements du discours psychanalytique, avec les notions de «communication pré-verbale», d’«enchevêtrement interpersonnel», d’«échange par la négociation» - elles peuvent servir à rapprocher psychanalyse et psychiatrie d’une façon qui aurait été encore inconcevable il y a dix ans.

Les éléments que nous décrivons sont les suivants :
1. La prise de contact active avec le patient, qui doit être marquée de respect et de retenue : ce dernier prend plaisir à se dissimuler, mais ce serait un désastre pour lui si le thérapeute ne le découvrait pas (Winnicott). 2. L’établissement d’une relation de maintien (holding), dans le sens de Winnicott : elle sera ensuite présente en arrière-plan pendant tout le traitement, l’accompagnera continuellement et discrètement. 3. Une relation de coopération avec la famille, qui joue un rôle extrêmement important du fait du type spécifique d’attachement inhérent aux troubles borderline. Les parents sont souvent perçu comme (la plus importante) source de soutien et il faut les faire participer activement à la thérapie, avec l’accord des patients. 4. La mise en réseau des professionnels, qui permet d’inclure systématiquement des tiers à la démarche thérapeutique : cet aspect est important car de nombreux patients sont mal capables de symboliser et d’intégrer; il permet aussi de gérer les inévitables conflits. 5. Le travail «bical» (Rauchfleisch) dans lequel le thérapeute prend pour point de départ les multiples problèmes sociaux dont souffrent ces patients, mais tente simultanément de les placer dans un contexte psychodynamique et de les interpréter. 6. La perception d’un sens caché (Mentzos), que ce soit au niveau intrapsychique ou à un niveau interpersonnel; ceci inclut le contexte biographique, mais aussi la gestalt scénique actuelle. 7. Une hypothèse fondamentale concernant la présence de conflits inconscients influençant le comportement même de patients dont la structure du moi n’est pas adéquate (Mentzos) ; cet aspect a des conséquences pour la relation comme pour la démarche thérapeutique. 8. L’investissement réciproque liant inévitablement thérapeute et patient dans les cas où ce dernier souffre de troubles graves: l’accepter (et ensuite le comprendre) permet de mieux saisir ses besoins et contribue donc à une évolution positive. 9. Une attitude active, qui joue un rôle particulièrement important dans le cas de patients souffrant d’un trouble de la symbolisation et qui dans tout setting psychiatrique, influe sur l’atmosphère dans laquelle se déroule le traitement. 10. Une démarche visant à fixer des limites au cadre, ce dernier représentant une réalité concrète qui préservera toutes les personnes impliquées d’investissements irréversibles et de régressions malsaines; ajoutons que le psychiatre doit toujours tenir compte de deux dimensions : il a été chargé d’un mandat de (ré-)insertion par la société, mais il a aussi des obligations (psycho)thérapeutiques envers le patient. 11. L’aspect soutien au développement de la thérapie, ce qui ne signifie pas seulement qu’elle doit procurer au patient espoir et confiance en l’avenir, mais aussi que le thérapeute doit gérer son setting de manière flexible et avisée (Fürstenau). 12. Et finalement, une attitude correspondant au «suffisamment bon » de Winnicott : le thérapeute doit gérer ses propres désirs d’omnipotence et ses propres fantasmes grandioses - ils sont inévitablement constellés lors du traitement de patients souffrant de troubles graves et un manque de réflexion ou de désinvestissement peut être cause de beaucoup de souffrance et de frustration (évitables).

Biographie de l'auteur

Rudolf Heltzel

Dr. Rudolf Heltzel, Nervenarzt, Arzt für Psychotherapeutische Medizin, Psychoanalytiker (DGPT) und Gruppenanalytiker (DAGG/GAS). Arbeitet in eigener psychotherapeutischer Praxis und als Supervisor, Berater und Fortbilder in zahlreichen psychiatrischen und psychosozialen Organisationen. 1. Vors. der Norddeutschen Arbeitsgemeinschaft für psychodynamische Psychiatrie (NAPP e.V.).

Korrespondenz: Dr. Rudolf Heltzel, Außer der Schleifmühle 56, D-28203 Bremen

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Publiée

2000-07-01

Comment citer

Heltzel, R. (2000). Les bases psychodynamiques de la psychiatrie communale. Science psychothérapeutique, 8(3), 107–116. Consulté à l’adresse https://psychotherapie-wissenschaft.info/article/view/519