Familles pauvres et enfants négligés – un cercle vicieux d’impuissance et d’espoirs déçus

Auteurs

  • Renate Blum-Maurice
  • Winfried M. Zenz

Résumé

Les deux auteurs dirigent le centre de protection de l’enfance de Cologne. Depuis le début des années 1990, ils s’intéressent plus particulièrement au thème de la pauvreté et de la négligence subie par les enfants. Dans le présent article, ils définissent d’abord ce qu’est la négligence et quelles sont ses formes spécifiques. Celles-ci ont beaucoup évolué, en particulier au cours des 25 dernières années. Des enfants peuvent tout à fait vivre dans des familles pauvres sans subir de dommage ; ils auront par contre de la peine à échapper aux risques plus globaux issus du manque d’argent : ressources de base limitées, chances amoindries au niveau de la formation, santé moins bonne et participation moindre à la vie et aux échanges sociaux. Ces facteurs posent de graves limites aux possibilités de développement et aux perspectives existentielles de ces enfants. On est pourtant étonné de constater le nombre de familles concernées qui réussissent à bien gérer leur vie, mais aussi à organiser avec courage, motivation et créativité une vie familiale qui permettra aux enfants de se sentir bien et en sécurité, pour ensuite élaborer leur propre projet de vie.

Lorsque la famille échoue, des troubles sérieux de l’interaction et de la perception peuvent se développer. La négligence envers les enfants forme souvent la base et la condition des abus physiques et sexuels. Les auteurs décrivent en détail les conséquences/les formes adoptées par cette maltraitance - celle-ci correspond en fait à un manque au niveau de la satisfaction de besoins vitaux du point de vue psychique et physique. On observe de plus en plus souvent que ce phénomène est présent même dans des familles dites bourgeoises disposant de moyens financiers très suffisants. Il faut alors parler de négligence due au bien-être matériel. En règle générale, ce type de cas est mal connu du grand public.

Selon les auteurs, la négligence ou le manque de soins sont provoqués par un trouble fondamental de la relation entre les parents (ou les référents) et les enfants. On trouve en parallèle des facteurs de stress particuliers. Les conséquences pour les enfants concernés sont importantes, compte tenu du fait que les nourrissons et les enfants en bas âge ne peuvent se défendre contre la situation et l’évolution du trouble. Souvent, le risque de décès est relativement élevé (manque de nourriture, etc.). Plus les dommages sont précoces, plus ils auront de conséquences dans tous les domaines futurs de l’existence. En principe, les enfants en bas âge qui font l’expérience de l’abandon et en particulier de leur impotence envers la situation ne peuvent qu’avoir un sentiment insuffisant de leur propre valeur. Le lien peu stable et la peur de nouvelles expériences d’impotence restreignent la possibilité qu’ils ont de demander de l’aide - même si celle-ci est offerte. Les enfants n’ont pas vraiment l’impression « d’être en eux-mêmes » et ne se perçoivent pas comme le « régisseur » de leur propre vie. Souvent, une profonde aspiration à l’amour et au soutien se traduisent plus tard par la quête incessante d’un partenaire et par un important désir d’avoir des enfants. En règle générale, ces aspirations - et c’est là l’aspect tragique - ne pourront être satisfaites qu’avec difficulté lorsque ces enfants atteindront l’âge adulte.

Des études montrent également que l’acceptation inconditionnelle de l’enfant par une autre personne représente probablement le facteur le plus important de résilience. Celle-ci est présente à partir du moment où le vécu peut-être assimilé et intégré dans la vie de l’individu, indépendamment du fait que celui-ci a subi de la maltraitance ou de la négligence. Elle n’est apparemment possible que si l’enfant a également bénéficié d’un soutien, d’interactions sensibles et de disponibilité dans le cadre de différentes formes de relations (peer group, réseaux sociaux). Les enfants qui ont été négligés ont besoin qu’on les traite avec beaucoup de patience, de compréhension et de circonspection.

Pour pouvoir jouer un rôle particulièrement utile, les aidants doivent être capables d’une capacité d’empathie différenciée et sensible, qui leur permettra de saisir la constitution psychique des adultes et ses conséquences pour la génération suivante. Dans ce sens, des relations d’aide peuvent avoir une fonction préventive décisive en permettant d’éviter que le dynamisme de l’abandon se répète. Mais elles peuvent également être ressenties par les clients comme une menace existentielle, comme quelque chose qui risque de les déstabiliser psychiquement.

Le principal défi auquel les spécialistes sont confrontés consiste à atteindre les parents et à leur faire accepter de l’aide. Lorsqu’ils y réussissent, une ressource essentielle est activée.

Bibliographies de l'auteur

Renate Blum-Maurice

Renate Blum-Maurice, Sozialwissenschaftlerin und Klinische Psychologin, psychoanalytisch-systemische Familien- und Kindertherapeutin, Fachleiterin des Kinderschutz-Zentrums Köln

Korrespondenz: Renate Blum-Maurice, Kinderschutzbund Köln, Bonner Straße 151, 50968 Köln

Winfried M. Zenz

Winfried M. Zenz, Erziehungswissenschaftler, Familien- und systemischer Therapeut, Kinder- und Jugendlichenpsychotherapeut; therapeutischer Leiter der Familienberatung im Kinderschutz-Zentrum Köln; in freier Praxis Supervision, Coaching und Konzeptentwicklung

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Publiée

2009-04-01

Comment citer

Blum-Maurice, R., & Zenz, W. M. (2009). Familles pauvres et enfants négligés – un cercle vicieux d’impuissance et d’espoirs déçus. Science psychothérapeutique, (2), 58–65. Consulté à l’adresse https://psychotherapie-wissenschaft.info/article/view/51