Internet, conseil et psychothérapie – un état des lieux tout juste actuel

Auteurs

  • Hedwig Graf-Oppolzer

Résumé

Au cours des vingt dernières années, Internet a progressivement acquis une excellente position dans le contexte des moyens de communication. Alors qu'en 1995 seulement 16 millions de personnes l'utilisaient, ce nombre a passé à 407 millions en 2000 - et à 1.02 milliards en mars 2006. Il reste qu'on enregistre un « digital divide » puisque la proportion de personnes connectées varie beaucoup selon le continent (chiffres pour 2006) : 50.7 % en Amérique du Nord et en Europe, 33.7 % en Australasie, mais seulement 7.8 % en Amérique latine et même 2.3 % en Afrique. On enregistre également un écart en Europe, entre les pays du Nord-Ouest et ceux du Sud-Est. En moyenne, 56 % de la population européenne a accès à Internet, avec - encore - une petite majorité d'utilisateurs de sexe masculin (gender gap). Ce sont les personnes jeunes, ainsi que celles qui sont en formation ou qui exercent une activité professionnelle qui utilisent le plus le Net. La télévision maintient sa position de tête en tant que médium - elle sert souvent à accompagner la journée, à offrir des bruits en coulisse, à fournir des modèles de comportement, et à se tenir au courant et s'informer rapidement. Internet et ses services en ligne servent plutôt de moyen de communication (courriel, chats), de source d'information et de réservoir de connaissances ; ils sont de plus en plus utilisés pour accomplir des tâches de routine (achats, e-banking etc.).

Au moment de choisir un médium on se fonde autant sur des aspects pragmatiques (disponibilité d'un équipement et connaissances techniques) que sur la manière dont on espère qu'il correspondra à un besoin donné. Internet satisfait des désirs spécifiques : possibilités de communication plus étendues, accès à l'information, transactions avec le soutien de systèmes numériques et divertissement. D'un point de vue sociologique, on peut dire que le Net correspond à la réalisation de soi devenue centrale à partir de la deuxième vague de modernisme (postmatérialistes, acteurs modernes, hédonistes et expérimentateurs [Schulze 2000]).

En Autriche, selon une directive émise par le ministère il est interdit de fournir des psychothérapies sur Internet (Bundesministerium für Gesundheit und Frauen 2005). La loi sur la psychothérapie indique que les psychothérapeutes sont dans l'obligation d'être présents en personne lorsqu'ils pratiquent leur profession. D'autre part, la loi sur le commerce en ligne et celle sur la protection des consommateurs ne laissent aux psychothérapeutes qu'une seule possibilité : avoir leur propre site Internet. Il reste qu'en choisissant une présentation claire, en indiquant que le transfert des données est sécurisé, en rappelant le cadre légal et en présentant de manière claire les méthodes psychothérapeutiques utilisées, chaque thérapeute peut contribuer à faire mieux accepter la psychothérapie et à diffuser des informations à son sujet.

Il est incontestable que de nombreuses personnes recherchent des conseils sur Internet. Des études ont déjà été faites, mettant en évidence les effets positifs des interventions menées par le biais du Net. Il est possible de cerner des groupes-cibles. La préférence accordée au Net a des causes variées : aspects financiers, manque d'infrastructure, handicaps physiques, mais aussi un besoin de garder l'anonymat lorsqu'il s'agit de problèmes qui font honte ou qui s'accompagnent d'un stigma. Ceci explique pourquoi ces personnes vont sur Internet, utilisant une offre facile d'accès. A un niveau plus différencié, il faut mener une réflexion sur le thème de la co-présence (dans le setting thérapeutique usuel) et de la télé-présence. On a souligné d'une part que la communication « face to face » permet de transmettre de nombreux signaux, alors que la « connexion sur un seul canal » offerte par Internet contribue à « vider la communication », à la « déréaliser » et même à la « déshumaniser ». Les partisans de la communication virtuelle soulignent, concernant le Net, les avantages de l'expression par écrit, l'ouverture d'esprit, les rapports égalitaires entre interlocuteurs, le fait que chacun est libre de gérer l'intensité des messages et leur fréquence, ainsi que l'apparition récente de nouveaux signes universels (ex. : emoticons).

L'ouverture et la facilité d'accès à Internet permettent de rabaisser les barrières sociales, psychologiques et physiques. Une offre immense et en bonne partie non-censurée permet aux utilisateurs de s'émanciper en se libérant de leur dépendance envers les traditionnelles sources d'information. Dans « l'expérience globale Internet » il va falloir décider si l'information transmise par Internet doit être commercialisée - ou si parce qu'ils reçoivent des informations, les utilisateurs sont mieux capables d'agir. Il sera difficile d'élaborer des réglementations adéquates qui ne restreignent pas l'autonomie des personnes recherchant des informations et des conseils. Les principales visées doivent être que les psychothérapeutes présents sur Internet puissent exercer cette activité avec professionnalisme, que des standards adéquats soient définis et que les mécanismes faisant que le traitement a des effets soient décrits. En effet, Internet permet d'accéder à des informations (par exemple sur la psychothérapie) et permet de les échanger avec d'autres. Ceci permet de diffuser des renseignements sur l'offre de psychothérapie que recevront des personnes bien en amont de leur « maladie».

Biographie de l'auteur

Hedwig Graf-Oppolzer

Hedwig Graf-Oppolzer, Psychotherapeutin und Supervisorin in freier Praxis, Leiterin der Fachsektion Integrative Gestalttherapie im Österreichischen Arbeitskreis für Gruppentherapie und Gruppendynamik, MSc für Psychosoziale Beratung und Lehrbeauftragte in diesem Bereich an der DonauUniversität Krems.

Korrespondenz: Währingerstraße 123/11, 1180 Wien, Österreich

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Publiée

2006-10-01

Comment citer

Graf-Oppolzer, H. (2006). Internet, conseil et psychothérapie – un état des lieux tout juste actuel. Science psychothérapeutique, (4), 193–198. Consulté à l’adresse https://psychotherapie-wissenschaft.info/article/view/309