Intersectionnalité dans l'accompagnement psychosocial des expériences de violence et/ou de discrimination faites par les lesbiennes, les gays et les trans*

Auteurs

  • Constance Ohms

Résumé

La vulnérabilité particulière des lesbiennes, des bisexuels, des gays et des trans* s'explique par la sanction à laquelle les expose leur supposée transgression des normes.

Les personnes concernées ont conscience de ce phénomène. Le fait d'être victimes de ces discriminations et/ou de ces violences, et de les craindre, génère un stress psychosocial spécifique dû à leur statut de minorité. Mais dans la mesure où ce stress psychique est variable d'une personne LGBT à une autre, il est nécessaire de déterminer quelles sont les ressources individuelles et sociales qui permettent de rester positif ou de renouer avec les aspects positifs de la vie. Il semble que les facteurs capables d'aider à retrouver ce positivisme peuvent tout aussi bien contribuer à accentuer la vulnérabilité des personnes concernées : il s'agit essentiellement de la famille d'origine et de la communauté dont font partie les individus.

Mais l'orientation sexuelle et l'identité sexuelle ne sont pas les seuls facteurs discriminants qui peuvent porter préjudice aux individus ou leur valoir des actes de violence : c'est aussi le cas pour l'origine ethnique, la couleur de peau, un handicap, une appartenance religieuse (ou le fait même de ne pas avoir de religion), l'âge, le statut social, etc. L'appartenance à plusieurs groupes sociaux défavorisés peut multiplier les obstacles, pour les personnes victimes de violence ou de discrimination, dans la recherche d'aide et de soutien. À l'inverse, certains privilèges, par exemple le fait d'appartenir à une couche moyenne ou élevée ou bien de posséder un bon degré d'éducation, facilitent le recours à des aides.

Lorsque la violence émane du conjoint ou de l'entourage proche, la vulnérabilité joue un rôle central : elle complique particulièrement le recours à des aides pour la victime de violence, mais aussi pour son auteur, car il faut alors en passer par deux «coming-out» : indiquer son orientation sexuelle ou son identité sexuelle à son interlocuteur, et préciser les circonstances dans lesquelles s'est exercée la violence de la part du conjoint. L'aspect particulier de la vulnérabilité joue également un rôle central dans la dynamique de la violence : elle est utilisée pour asseoir une domination et un pouvoir. Ainsi le statut résidentiel précaire d'un partenaire peut être «exploité» afin de prendre le contrôle et le pouvoir sur lui.

Dans le cadre d'une aide psychosociale ou d'une psychothérapie, il est par conséquent indispensable d'en permettre l'accès à des personnes appartenant à des groupes particulièrement vulnérables pour qu'ils puissent y avoir recours. Par ailleurs, le conseiller/thérapeute doit avoir conscience que l'appartenance à un groupe vulnérable a un impact fort sur le processus de consultation lui-même : Ceux qui appartiennent à des groupes vulnérables ont déjà fait l'expérience de la discrimination et sont donc à la fois critiques et sensibles à l'égard d'éventuelles discriminations. Il arrive que les expériences essentielles de violence, par exemple dans le couple ou par un membre de la famille d'origine, ne soit évoqué que très tardivement dans la consultation. Les situations spécifiques qui découlent de l'appartenance à plusieurs groupes sociaux discriminés nécessitent une identification des ressources spécifiques de résilience et leur encouragement. Ce qui n'est possible que si le thérapeute/conseiller connaît suffisamment bien le contexte dans lequel vivent les LGBT*IQ.

Mots clés:vulnérabilité, identité sexuelle, discriminations multiples, violence domestique, tabou, obstacle à l'accessibilité

Biographie de l'auteur

Constance Ohms

Constance Ohms, docteur en sciences sociales, exerce en libéral. Fondatrice et présidente de l'association allemande «Broken Rainbow», qui lutte contre la violence et les discriminations. Axes thématiques : Effets des discriminations multiples sur la capacité de résilience dans les groupes particulièrement vulnérables, violence domestique dans les couples homosexuels et trans*.

Publiée

2016-12-29

Comment citer

Ohms, C. (2016). Intersectionnalité dans l’accompagnement psychosocial des expériences de violence et/ou de discrimination faites par les lesbiennes, les gays et les trans*. Science psychothérapeutique, 6(2), 152–160. Consulté à l’adresse https://psychotherapie-wissenschaft.info/article/view/258