L’affectivité en tant que centre de distribution entre les symptômes psychiques et les symptômes psychosomatiques
Résumé
L’une des questions les plus fondamentales en psychosomatique est celle de savoir ce qui fait qu’un trouble se manifeste soit au niveau psychique - dans le vécu ou le comportement -, soit au niveau psychosomatique. Sans entrer plus en détail dans les modes d’explication bien établis en psychosomatique, nous tentons, par notre contribution, de répondre à cette question en demeurant très proches du niveau de l’expérience. La présentation détaillée d’un cas nous permet d’illustrer et de décrire les différents aspects qui ont fait que ce client a des symptômes psychosomatiques, à savoir un trouble somatoforme concret (douleurs dorsales). Nous considérons qu’il est essentiel d’utiliser une anamnèse détaillée en tant qu’outil permettant d’acquérir des informations et sans laquelle il n’est pas possible d’assumer un diagnostic positif fondé. Il arrive encore très souvent que le diagnostic d’un trouble psychosomatique (hypothétique) soit posé ex post, c’est-à-dire par élimination, lorsque lesthérapies conventionnelles n’ont pas eu de succès pendant plusieurs années.
Par rapport à la question posée plus haut, nous considérons que l’affect et sa désintégration jouent un rôle essentiel. La principale partie de notre travail est consacrée à ce thème. Il semble que l’affectivité joue le rôle d’aiguilleur de processus psychosomatiques, c’est-à-dire d’endroit où le choix se fait entre un symptôme psychique et un symptôme psychosomatique.
En utilisant une description fondée sur notre expérience, nous visons à traiter notre thème de manière telle qu’une passerelle puisse être construite pour relier deux perspectives fondamentalement différentes, celle, extérieure, adoptée par la physiologie et celle, intérieure, correspondant au vécu. À ce niveau, le passage de l’affect à l’émotion est considéré comme le point de départ de troubles affectifs. Lorsque l’affect se désintègre, ses composantes se dissocient, la situation stressante ne peut plus être interprétée correctement et la personne ne peut plus agir dans le sens d’une régulation du déséquilibre. La voie est alors ouverte à la naissance d’un symptôme (psycho)somatique.
Le fait qu’il ne soit pas possible de réconcilier perspective intérieure et perspective extérieure crée aussi des problèmes au niveau de la thérapie. Lorsque le médecin adopte une approche objective et, par exemple, procédant de manière causale prescrit un corset à porter pendant plusieurs semaines pour traiter ce qui n’est pas en soi pathogène, l’hypermobilité des segments de la colonne vertébrale impliqués, il ne néglige pas seulement d’attribuer de l’importance à la signification du symptôme mais, dans le cas précis, il utilise une intervention qui va renforcer les causes de la maladie. De plus, à chaque fois que les médecins adoptent la perspective extérieure qui est propre à leur discipline, ils contribuent à fixer la perte de sens déjà provoquée par la désintégration de l’affect ; les mesures de type thérapie causale n’auront alors plus aucun effet. Il faut absolument utiliser une approche basée sur ce phénomène de désintégration et il est particulièrement important d’établir une relation suffisamment solide pour que, dans son cadre, il devienne possible de parler de contenus affectifs difficiles.
Dans ce sens, le « containment » joue un rôle important : le/la thérapeute devient alors un refuge où peuvent être déposés les domaines désintégrés de l’affect et qui fournit un sentiment de sécurité, de telle sorte que l’expérience d’être tenu même dans un état affectif impliquant l’inconnu, le réprimé, le désintégré (et la douleur, la colère, le deuil ...) permet de réintégrer les affects désintégrés. Les facteurs que nous avons indiqués n’impliquent pas forcément que la personne doit suivre un traitement psychothérapeutique. Ce type de soutien peut être fourni par des médecins disposant d’une certaine expérience, dans la mesure où c’est à eux que l’on s’adresse en général lorsqu’on souffre de symptômes somatiques.
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Publiée
2008-01-01
Comment citer
Frischenschlager, O. (2008). L’affectivité en tant que centre de distribution entre les symptômes psychiques et les symptômes psychosomatiques. Science psychothérapeutique, (1), 31–38. Consulté à l’adresse https://psychotherapie-wissenschaft.info/article/view/102
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