Au-delà du concevable : le patient et le thérapeute dans le même collectif
Résumé
Dans son article, notre collègue israélienne traite des difficultés rencontrées par le travail psychothérapeutique lorsqu'un traumatisme collectif touche inévitablement les deux partenaires de la dyade. Elle part de l'hypothèse que l'identité de la psychothérapeute est formée par un contexte collectif et ne peut pas en être séparée. Elle examine dans ce sens la manière dont les problèmes affectant l'existence en Israël influent sur son travail : comment des fantasmes et expériences collectives, partagés par patient et thérapeute, peuvent-ils être traités séparément de ce qui fait l'individualité des partenaires?
Elle décrit d'abord l'expérience des thérapeutes israéliens, dont l'histoire individuelle est étroitement liée à celle de leur pays. Tous les Israéliens entretiennent une relation émotionnelle avec l'armée et le sentiment de menace individuelle est directement associé à la menace subie par le pays. Savoir qu'on peut en tout temps être victime de la violence est une dimension vécue consciemment par tous.
L'identité collective du peuple juif ne se fonde pas seulement sur sa religion et sa culture, mais aussi sur les traumatismes collectifs qu'il a vécu. En plus des rituels célébrant le souvenir et le deuil, on rencontre un fort besoin d'oublier et de nier les effets du traumatisme. Les habitants d'Israël utilisent donc des mécanismes d'adaptation basés sur le déni, le rejet et la fuite dans la normalité du quotidien. Leur santé psychique ne tient littéralement qu'à un fil, celui qui sépare une perception adéquate de la réalité, indispensable a la santé, de l'utilisation de mécanismes de répression permettant de fonctionner de manière appropriée.
La réalité déniée par le collectif est fréquemment présente dans l'espace thérapeutique et beaucoup de travail doit être fait à ce niveau, l'attention se portant alternativement sur la réalité extérieure et l a réalité intérieure. La violence au quotidien fait aussi qu'il est difficile de construire des processus de groupe, car la tendance à la projection et à la dissociation est renforcée par la pression du traumatisme.
L'auteur présente des exemples de cas pour montrer comment elle tente constamment de prévenir la fragmentation et d'aider ses patients à élaborer un vécu cohérent. A ce niveau, il est essentiel d'effectuer une distinction entre l'individuel et le collectif-essentiel, mais très difficile.
Elle considère son cabinet comme un lieu d'espoir, où la dure réalité peut être contenue, exprimée et supportée. Le « travail d'espoir» consiste en une confrontation a la menace et a la douleur, mais aussi et finalement en un développement du psychisme. L'attitude thérapeutique adéquate est celle de la sérénité.
Les psychothérapeutes qui travaillent avec des clients subissant des menaces et des traumatismes en ressortent enrichis intérieurement. Ils apprennent à mieux apprécier la vie et le courage de leurs patients leur fournit de l'énergie vitale, l'inspiration et l'espoir. Ils font l'apprentissage de «l'intégrité », du choix délibéré de la vie face a la mort et du respect des limitations tragiques de l'existence.
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