Article inédit - Synthèse

Monika Dreiner

Droit de visite des enfants traumatisés et placés – visites : bien-être (des parents) et mal-être (des enfants) : Répercussions de la règlementation du droit de visite sur le développement des enfants traumatisés placés.

Il existe de nombreuses configurations familiales qui poussent un juge pour enfants ou un service de protection de l'enfance à retirer des enfants de leur famille d'origine et à les placer dans des familles d'accueil ou des maisons d'éducation pour adolescents. Il s'ensuit des visites plus ou moins régulières des parents biologiques auprès de l'enfant par mandat du juge ou à l'initiative des parents biologiques. Mais le droit de visite des parents à leur enfant est souvent déterminé en suivant les dispositions générales appliquées en cas de divorce, sans prise en compte des besoins spécifiques des enfants.

Pourtant, le droit de visite est généralement contre-indiqué pour les enfants qui ont été traumatisés par les adultes de référence durant la phase prénatale ou la petite enfance. Cet article entend attirer l'attention sur la prise en compte nécessaire de la situation spécifique de ces enfants et sur le fait d'assurer leur bien-être sous cet angle particulier.

Des traumatismes précoces infligés par les personnes d'attachement conduisent, dans la majorité des cas, à un attachement émotionnel déstructuré de l'enfant. Ce qui signifie, sur le plan des visites, que les contacts ne permettent pas de maintenir ni de développer des relations positives. Ces contacts devraient pourtant servir en premier lieu à construire une relation mieux structurée aux personnes de référence primaires. S'ajoute à cela, le fait que les personnes d'attachement principales ne sont souvent pas en mesure d'offrir un attachement adéquat à leurs enfants. Ils sont souvent eux-mêmes traumatisés, sont remis face à leurs insuffisances à l'occasion des visites et ne parviennent pas à les corriger. Lorsque la visite a lieu, il n'est pas rare que tous les participants soient affectés, perturbés. L'une des échappatoires habituelles pour les parents biologiques consiste à raréfier les contacts, sans avertissement préalable. Ce comportement empêche que l'enfant et les parents se disent au revoir et pleurent chacun cette perte. Les parents biologiques sont étiquetés comme non coopératifs, tandis que l'enfant éprouve des difficultés à faire confiance aux parents de substitution.

Lorsque les parents biologiques exercent leur droit de visite, il s'installe une situation dans laquelle l'enfant doit, à la fois, entretenir la relation à sa famille d'origine et se laisser aller à s'attacher aux nouveaux adultes de référence. Non seulement, c'est trop exigé de l'enfant, mais en plus, cela lui impose d'entretenir des contacts précisément avec les personnes qui sont à l'origine du traumatisme. Chaque visite réactive l'expérience traumatisante tant que l'enfant n'a pas la possibilité de nouer une nouvelle relation solide. Dans cette mesure, les visites des parents empêchent donc que l'enfant gère et dépasse son traumatisme. Le fait que les parents nourriciers, les éducateurs référents ou les accompagnateurs qui emmènent l'enfant aux visites, le livrent quasiment à son bourreau complique encore la situation. Ces personnes ont l'impression de ne pas protéger l'enfant, d'être elles-mêmes des bourreaux et sont perçues par les enfants comme des personnes qui n'assurent pas leur sécurité.

Pour le réseau d'auxiliaires, chaque décision de placement est une intervention dans le système familial qui est conflictuelle. Pour faciliter le retrait de l'enfant en toute bonne foi, il est fréquent que la position prise ne soit pas claire. Prendre parti pour l'enfant est interprété comme une opposition aux parents. Les visites entretiennent un flou qui ne permet pas d'y voir clair. Le travail sur les expériences traumatisantes stagne et la reprise du développement, là où il a été interrompu, ne se fait pas.

Le modèle général de développement dialectique de Fischer (2007) nous permet de comprendre qu'il est judicieux d'organiser les visites en tenant compte de ses principes. Ce n'est que si l'enfant a l'occasion de construire une alliance et une relation de transfert avec ses nouveaux adultes de référence qu'il a une chance de dépasser l'intolérable. Pour cela, il est nécessaire qu'il n'y ait aucun contact avec les auteurs du traumatisme (dans ce cas, les parents biologiques). Ce n'est qu'à cette condition que l'enfant peut faire confiance et oser déconstruire l'ancien modèle relationnel qui lui pèse pour faire de nouvelles expériences et les intégrer à son projet de vie.