Kathleen Schwarzkopf & Roland von Känel
Psychotherapie-Wissenschaft 7 (2) 71–72 2017
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Mots-clés : burnout reflète, psychosomatique, épuisement, psychothérapie centrée sur le corps, Gestalt-thérapie
Le burnout reflète, plus que toute autre affection, les deux faces de la société contemporaine : celle de la performance, du sacrifice, de la force, de la surmotivation et du perfectionnisme – contrairement à la fatigue permanente, l’épuisement, l’apathie, la douleur chronique comme les maux de dos.
Cet article de synthèse donne un aperçu théorique de la terminologie la plus courante du burnout et de ses éléments principaux – épuisement émotionnel, cynisme et performance réduite. Le burnout est fréquemment considéré comme résultat causal des facteurs de travail tout en négligeant l’interaction entre l’esprit (psyché) et le soma (corps). Des recherches neurobiologiques peuvent à présent démontrer de manière impressionnante que pensées et sentiments sont étroitement liés avec le corps et les sensations corporelles. Seules des améliorations superficielles et de courte durée peuvent être réalisées par un unique changement d’une situation de travail critique. Des relations entre l’apparition de symptômes de burnout et les apparitions à répétition de maladies psychiques et somatiques ont été démontrées dans de nombreuses études. L’émergence du burnout est ainsi un processus résultant de toute une variété de symptômes physiques, émotionnels, cognitif et comportementaux. Il est donc essentiel de considérer le burnout en se focalisant non seulement sur le lieu de travail mais aussi sur des perspectives multifactorielles et multidimensionnelles. Ceci est illustré précisément par le modèle du cube anthropologique, un concept de base de la psychothérapie centrée sur le corps IKP. C’est une extension du modèle biopsychosocial d’Engel, qui intègre les constellations biologiques de risques, les facteurs de stress psychologique et les facteurs de causalité liés au travail. En plus de la dimension physique, psychologique et sociale, le modèle du cube anthropologique IKP intègre également la dimension vitale spirituelle-porteuse de sens, la dimension vitale de l’espace et la dimension vitale du temps. Il doit être considéré comme une extension de la pensée linéaire-causale et la considération isolée de phénomènes qui est nécessaire pour un diagnostic CIM-10. Selon la conception de la psychothérapie centrée sur le corps IKP, un burnout apparaît si l’équilibre des six dimensions vitales est trop perturbé. Le déséquilibre est le résultat de l’interaction des influences extérieures ainsi que du manque de capacité de la personne d’initier elle-même le processus de croissance et changement. Il en résulte une perturbation dans le processus d’autorégulation car l’individu n’est plus en mesure de satisfaire ses besoins. Un burnout n’est donc pas seulement à attribuer à du vécu mais également à un manque d’adaptation et d’intégration dans notre époque fortement orientée vers la productivité. Cette approche multidimensionnelle de la symptomatologie du burnout est illustrée par les facteurs de stress et ressources au moyen d’un exemple de cas. De manière analogue au procédé combiné avec l’activation couplée de ressources et la résolution de problèmes (comme facteurs actifs psychothérapeutiques complémentaires) dans la psychothérapie centrée sur le corps IKP. Cette méthode psychothérapeutique, basée sur la Gestalt-thérapie, est caractérisée par l’orientation sur les processus et ressources, la focalisation sur les émotions et les besoins ainsi que l’activation d’expériences. Le terme « centrée sur le corps », de nature historique, fait référence à la délimitation par rapport à des formes de la psychothérapie purement verbales et donne une description incomplète – « multidimensionnelle » serait plus approprié. Les personnes concernées par le burnout sont accompagnées de manière holistique tout au long de leurs conditions de vie. La part stabilisante du travail augmentant l’estime de soi est à nouveau au centre de l’intérêt et des stratégies de coping concrètes sont développées pour les facteurs de stress liés au travail, les structures de travail sont améliorées, une culture d’appréciation et d’environnement de travail positif est encouragée, la contrôlabilité ainsi qu’un équilibre entre utilisation des ressources et résultat sont encouragés. Des petits changements dans les différentes dimensions de la vie se renforcent mutuellement et entraînent la diminution du trouble. Il est d’usage dans l’approche psychothérapeutique centrée sur le corps de «traduire» le contenu de conversations en expériences et expressions physiques et, que tout ce qui est perçu et vécu dans ce cadre, soit ensuite à nouveau consigné par écrit. La thérapie intégrative et holistique de la psychothérapie centrée sur le corps IKP est p.ex. clairement démontrée par la technique du « shift actif ». Le passage permanent d’une dimension de vie à une autre doit être compris comme principe de vie et de fonctionnement fondamental qui empêche de tomber malade par fixation dans une dimension. Le centrage sur la communication du lieu et du moment précis, l’intégration des symptômes physiques, l’accentuation de la responsabilité individuelle ainsi que le renforcement de l’autonomie et l’épanouissement personnel sont essentiels au sens de la thérapie humaniste dans le cas d’un burnout. La démarche de la psychothérapie centrée sur le corps IKP implique une vision holistique de l’expérience humaine – non dichotomique et non linéaire – et est donc à considérer comme antagoniste à la procédure CIM-10 unidimensionnelle. Cela demande aussi de se distancer de simples liens de cause à effet et de l’observation isolée de phénomènes.
Le burnout doit donc être considéré comme une expression clinique de l’interaction des différentes dimensions : du corps, de la psyché, du social, de la spiritualité, de l’espace et du temps.
Les auteurs
Kathleen Schwarzkopf, MSc, psychothérapeute ASP reconnue au niveau fédéral, psychologue et psychothérapeute IKP, coach DBVC, psychologue de réseau ICAS. Active dans la recherche au sein de l’hôpital universitaire de Berne et de l’université de Berne. Spécialités: gestion de crises, burnout et autres maladies découlant du stress, replacement externe et réorientation professionnelle, psychothérapie assistée par les chevaux. Travaille dans un cabinet psychiatrique-psychothérapeutique ambulatoire intégratif. Exerce comme indépendante à Berne (www.praxis-am-waldrand.ch)
Roland von Känel, Prof. Dr méd., spécialiste en médecine interne générale et en psychiatrie et psychothérapie. Médecin-chef du département de médecine psychosomatique de la clinique de Barmelweid dans le canton d’Argovie. Professeur titulaire à l’université de Berne. À la clinique et dans le cadre de ses recherches, il se consacre depuis de nombreuses années au phénomène des burnouts. Afin d’évaluer les burnouts en tant que facteur de risque pour les maladies psychiques et physiques dues au stress, il a participé au développement d’une application Internet libre d’accès www.burnoutprotector.com