L’émergence psychothérapeutique médicale : une pratique de la médecine intégrée
Manfred Sauer & Sabine Emmerich
Psychotherapie-Wissenschaft 7 (2) 27 2017
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Mots-clés : maladie chronique des organes, régression radicale, dialogue du vécu, établissement d’une relation orientée vers le développement, coopération psychothérapeutique médicale
« Les réalités sont pourtant lentes et indescriptiblement détaillées. »
Rainer Maria Rilke
Les détériorations de l’intégrité corporelle dues à la maladie ou à l’accident ne provoquent pas seulement une panne des fonctions corporelles, mais généralement aussi une dégradation psychique avec des conséquences importantes pour les malades eux-mêmes, mais aussi pour leur environnement et leur entourage.
Les dommages au système nerveux constituent par ailleurs un défi particulier, car en même temps que les attaques neurologiques, les capacités, comme l’interaction sociale, la communication et la conscience sont également dégradées et ainsi les personnes concernées plongent elles-mêmes dans une crise, mais également le système familial.
Une telle situation existait pour une patiente de 14 ans qui souffrait d’une dégradation auto-immune du cerveau et de la moelle épinière. En plusieurs crises, la maladie a abouti en l’espace de six mois en un syndrome Locked-in avec perte de la motricité volontaire et d’expression. Pour tous, les malades eux-mêmes, le système familial, mais également pour l’équipe soignante, une évolution de la maladie dramatique, qui fut le début d’une coopération psychothérapeutique médicale.
Elle a été réalisée par trois modes d’interaction qui complètent la procédure classique de diagnostic-thérapie, un échange régulier entre la psychothérapeute, le médecin et la patiente (mode d’interaction I), entre la psychothérapeute, le médecin et l’équipe soignante (mode d’interaction II) et entre la psychothérapeute, le médecin et le système familial (mode d’interaction III). Grâce à la continuité de l’échange, une relation psychothérapeutique médicale a été établie, dans le déroulement de laquelle les connexions entre les circonstances situatives et l’histoire de la maladie et du malade ont été exprimées.
Contrairement à la thérapie traditionnelle orientée sur une pathologie objective de la maladie, le vécu, en tant que phénomène central d’une pathologie subjective, a été replacé au centre de la réflexion, et notamment le vécu du côté des malades, du côté du système familial, et en tant que contrepoint à cela le vécu du côté de l’équipe soignante.
Grâce à cette perspective modifiée, les symptômes ont signifié, au-delà de leur nature de défaut, des signes d’une relation dysfonctionnelle environnement-organisme. Sur deux autres exemples, une patiente atteinte d’épilepsie et une patiente dans le coma après une noyade, il a été réalisé à titre exemplaire que dans toutes les situations critiques existentielles liées à la maladie ou à l’accident, une régression radicale physio-psychosociale apparait. Dès que cette connaissance a pu être mise en œuvre dans le cadre d’une thérapie créative orientée sur chaque développement individuel, on a constaté des progrès inhabituellement positifs en comparaison avec la méthode traditionnelle.
Les auteures
Sabine Emmerich, Dipl.-Psych., Dipl.-Péd., psychothérapeute psychologique pour adultes, enfants, adolescents et groupes, enseignante en psychotraumatologie
Manfred Sauer, Prof. Dr. med., FA de Neurologie, FA de Pédiatrie, enseignant en psychotraumatologie