Développement, facteurs de risque et mécanismes de protection employés contre la solitude

Tout au long de la vie et à un âge adulte toujours plus avancé

Mareike Ernst

Psychotherapie-Wissenschaft 14 (2) 2024 17–18

www.psychotherapie-wissenschaft.info

CC BY-NC-ND

https://doi.org/10.30820/1664-9583-2024-2-17

Mots clés : solitude, âge, facteurs de risque, facteurs de protection, personnalité, attachement, psychodynamique

La solitude représente un risque considérable pour la santé et est actuellement au cœur de programmes de recherche empiriques dans différentes disciplines. Dans la recherche en psychologie et en sciences sociales, la solitude est définie comme une expérience émotionnelle subjective négative résultant d’un décalage perçu entre les relations sociales réelles et souhaitées. Tant les traits de personnalité comme l’introversion et l’extraversion que les facteurs situationnels comme les conditions de vie et le statut relationnel influencent la solitude. La contextualisation de ce sentiment tout au long de la vie comprend les changements en matière de besoins et de relations sociales, les revers de la vie, les opinions positives ou négatives sur la vieillesse et, enfin, l’histoire du développement de l’individu, y compris les expériences relationnelles intériorisées.

Bien que la recherche sur la solitude se concentre souvent sur l’âge adulte avancé en raison de l’accumulation de facteurs de risque à cette étape de la vie, la solitude n’est pas universelle et n’est pas non plus un problème exclusivement lié à l’âge. Au contraire, la solitude peut toucher les individus de tout âge, un premier pic étant discernable au début de l’âge adulte. Les associations stéréotypées entre vieillesse et solitude peuvent suggérer que la solitude serait un phénomène attendu ou inévitable avec l’âge venant, ce qui n’est pas vrai. En effet, de nombreuses personnes âgées entretiennent des relations sociales épanouissantes et ne se sentent pas seules. Il est pourtant vrai d’affirmer que la solitude touche différemment les divers groupes de la population et que l’âge joue un rôle important dans la vulnérabilité à la solitude et ses effets sur la santé et le bien-être. Les facteurs de risque spécifiques à l’âge adulte avancé sont, par exemple, le veuvage, le fait de vivre seul et un mauvais état de santé/de nouvelles maladies et des restrictions.

Parallèlement, les traits de la personnalité et les expériences relationnelles précoces jouent un rôle décisif dans le développement de la solitude. Les expériences négatives, telles que la négligence ou la violence, peuvent par exemple conduire à une méfiance interpersonnelle et à une cognition sociale inadaptée et augmenter durablement le risque de solitude. Inversement, les expériences précoces positives avec les personnes de référence les plus importantes peuvent favoriser un style d’attachement sûr, qui favorise des relations sociales plus saines et réduit la solitude à long terme. Des transitions importantes dans la vie, telles que le départ du domicile parental ou la retraite, peuvent augmenter le risque de solitude, en particulier à l’âge adulte avancé, alors que l’accès à des activités récréatives et culturelles et un sentiment d’appartenance à une communauté peuvent protéger de la solitude les adultes plus âgés. L’idée d’une interaction entre la personnalité individuelle et les facteurs situationnels implique que des situations similaires peuvent conduire à des résultats différents en termes de solitude chez différentes personnes. Les effets des facteurs de risque dépendent donc également de la constitution psychique qu’elles rencontrent.

La solitude peut également être abordée dans le cadre d’une psychothérapie, dans la mesure où des interventions utiles pourraient se concentrer sur différents des facteurs de risque mentionnés afin d’atténuer la solitude et de renforcer le mental des personnes concernées : à l’heure actuelle, les preuves les plus probantes concernent la remise en question et la modification des cognitions sociales inadaptées. Les approches psychodynamiques tenteraient de comprendre la solitude sur fond de conflits (en partie inconscients), de capacités psychiques basiques au sens de l’autorégulation et de la régulation des relations, de la qualité des expériences précoces d’attachement et de leur pertinence pour l’expérience dans l’instant présent. Elles pourraient également inclure la confrontation de désirs contradictoires (p. ex. autonomie vs soins) en rapport avec les pertes et les gains liés à l’âge, ainsi que le renforcement des ressources psychologiques et sociales.

Note biographique

Dr. Mareike Ernst est professeur tenure track en recherche psychodynamique orientée sur la psychothérapie à l’Institut de psychologie de l’Université Alpen-Adria de Klagenfurt et chercheuse invitée au Suicidal Behaviour Research Laboratory de l’Université de Glasgow. Outre la recherche en psychothérapie ou en rapport avec celle-ci, ses recherches portent sur la solitude, la suicidalité et la psycho-oncologie.

Contact

Dr. Mareike Ernst
Abteilung für Klinische Psychologie, Psychotherapie und Psychoanalyse Institut für Psychologie
Alpen-Adria Universität A-9020 Klagenfurt am Wörthersee
mareike.ernst@aau.at