Rapport provenant d’un séminaire du séminaire analytique du dasein DaS
Alice Holzhey
Psychotherapie-Wissenschaft 12 (1) 2022 31–32
www.psychotherapie-wissenschaft.info
https://doi.org/10.30820/1664-9583-2022-1-31
Mots clés : deuxième accréditation, psychothérapie psychanalytique, Daseinsanalyse, philosophie existentielle, instruments d’évaluation, cohérence factuelle, validation scientifique
Alice Holzhey et Gisela Thoma ont organisé le 30 octobre 2021 un séminaire d’un jour entier sous cet intitulé. La décision du DaS de renoncer à une seconde accréditation par la Fédération avait déjà été prise à ce moment-là.
La question directrice qui s’est posée pendant toute cette journée était : Comment devraient être conçus les instruments avec lesquels une évaluation est réalisée ? Cette question est volontairement formulée de façon aussi ouverte pour que deux réponses puissent y être apportées, qui ne sont pas compatibles. Car soit on rapporte le Comment à la « validité scientifique » des instruments, soit on rapporte le Comment aux différentes directions existant au sein du domaine de la psychothérapie auquel elles s’appliquent. Les deux réponses ont déterminé notre séminaire : nous avons au début discuté de la crainte fondée que l’OFSP ne mise dans ses nouvelles directives pour la seconde accréditation unilatéralement sur la « validité scientifique » d’instruments d’évaluation en se soumettant à cette occasion à cette notion scientifique raccourcie des sciences naturelles que les professeurs de la psychologie universitaire ont vanté comme l’unique notion scientifique encore défendable dans la lettre qu’ils ont adressée le 23 août 2019 à l’OFSP en exigeant simultanément qu’elle soit généralement contraignante pour la seconde accréditation, parce qu’une « préservation à long terme de la qualité des soins psychothérapeutiques en Suisse » ne pouvaient être garantie que de cette manière.
I Questionnaire orienté vers les symptômes en tant qu’instruments d’évaluation. C’est notamment dans le contexte de cette lettre de cette « lettre de menace » à l’OFSP que nous nous sommes penchés dans la partie I du séminaire sur les deux questionnaires liés BSCL (Brief Symptom Checklist) et HoNOS (Health of the Nations Outomes Scales), qui faisaient partie des documents précédemment envoyés. Dans les cliniques psychiatriques et psychothérapeutiques dans lesquelles ces derniers sont (doivent) aujourd’hui être utilisés dans toute la Suisse pour l’évaluation, le patient et le thérapeute doivent l’un et l’autre remplir un questionnaire au début et à la fin de la thérapie. Il est rapidement apparu clairement à nos yeux que de tels questionnaires conviennent seulement pour l’évaluation de psychothérapies qui fonctionnent elles-mêmes également de façon orientée d’après les systèmes, comme c’est le cas pour la TC et la TCC. En revanche, si l’efficacité d’une psychothérapie psychanalytique est « étudiée » au moyen de ces instruments, il peut apparaître comme un échec, ce qui indique de fait un changement intrapsychique important chez le patient.
C’est avec une certaine ironie que nous avons pris connaissance du fait que justement un instrument d’évaluation qualifié de « scientifique » au sens de la psychologie et de la psychiatrie universitaire s’en remette, comme unique source de données, à un questionnaire qui ne contient que des indications personnelles et donc purement subjectives, et doivent par conséquent se fier complètement à la bonne volonté, à la capacité et à la disposition à fournir des renseignements honnêtes des personnes interrogées.
II La HUS : un instrument d’évaluation adapté à la psychothérapie psychanalytique. La HUS (échelle de restructuration de Heidelberg) nous a permis de prendre connaissance d’une « échelle des étapes » qui sert à estimer l’efficacité d’un processus thérapeutique psychanalytique. Il est devenu simultanément clair à nos yeux que cet instrument d’évaluation se fonde sur une tout autre compréhension de la psychothérapie que le questionnaire de symptômes de la BSCL et de la HoNOS : s’il s’agissait là d’enregistrer les changements survenus au niveau des symptômes, il s’agit ici d’enregistrer les changements survenus dans le psychisme interne dans la relation à soi-même. Ce qui enregistré ici, c’est l’ouverture respective, l’honnêteté et le retour vers soi-même : depuis le confort propre initial presque total du fait de mécanismes d’abnégation jusqu’à une occupation de plus en plus ouverte d’événements douloureux voire imprégnés de sentiments de culpabilité et de honte refoulés remontant à l’enfance et dont on doit supposer qu’ils reposent sur des symptômes de souffrance manifestes. Quiconque s’engage dans un tel processus n’est à la fin plus « le même » comme au début de ce processus, tandis qu’une psychothérapie orientée d’après les systèmes en psychothérapie a pour seul but de redevenir celui ou celle qu’on était au départ ou serait devenu(e) sans les symptômes pathologiques.
Les étapes les plus importantes qui se succèdent de façon typiquement idéale dans le processus de changement sont décrits dans les sept niveaux de cette échelle. Mais parce que le patient ne parcourt pas ce processus seul, mais en compagnie du thérapeute, la HUS ne peut rien faire d’autre que de toujours indiquer également ce dont le thérapeute fait simultanément l’expérience, et la fonction et le rôle qui reviennent aux différents niveaux du processus d’auto-modification.
Nous avons été impressionnés de voir à quel point la seule lecture comparative de ces deux instruments d’évaluation permet de conclure au caractère fondamentalement différent de curricula de formation postgrade qui conduisent au thérapeute du comportement ou au thérapeute psychanalyste. Pendant que le futur thérapeute du comportement doit principalement se voir enseigner le savoir qu’il doit, en tant qu’expert en thérapie, appliquer en fonction des troubles spécifiques, une formation de thérapeute psychanalyste se présente tout autrement, puisque celle-ci doit également impliquer toute sa personne, afin de le mettre en capacité de participer avec une empathie et une compréhension croissante au processus de changement psychanalytique de son patient, sans pour autant perdre sa liberté intérieure.
III De quelle manière peut-on reformuler la HUS pour devenir elle aussi un instrument d’évaluation « cohérent » pour la psychothérapie du Dasein ? Le lecteur aura déjà reconnu l’instrument d’évaluation auquel nous vouions notre sympathie dans ce séminaire. C’est ainsi que nous avons pour conclure la question de savoir si nous pourrions même adopter la HUS telle quelle. Mais ceci est contredit par la particularité d’une psychothérapie analytique du Dasein, qui repose sur une image de l’être humain fondée sur une philosophie existentielle qui approfondit également notre concept largement psychanalytique de la souffrance psychique en termes de philosophie existentielle.1
Mais est-ce que la HUS peut seulement être reformulée de façon à pouvoir également exprimer cette compréhension philosophique approfondie de la souffrance psychique ? Au lieu d’en débattre de façon abstraite, j’ai proposé un premier projet encore tout à fait provisoire : celui-ci consistait à reproduire à gauche sur le papier les formulations existant jusqu’ici des sept niveaux de la HUS, et à droite en correspondance horizontale mes propositions correspondantes de reformulation possible des sept niveaux. Je me suis réjoui du grand intérêt que cette tentative a suscité, tout comme l’intense discussion qui en a résulté.
Il nous reste toutefois encore une autre tâche à accomplir, à savoir celle de formuler les focus d’analyse du Dasein spécifiques. Nous n’avons cependant pas pu l’aborder dans ce séminaire pour des raisons de temps. C’est la raison pour laquelle notre séminaire s’est conclu avec l’intention de se consacrer à cette tâche dans un prochain séminaire et d’exploiter à cet effet des exemples de thérapies concrètes des participants au séminaire.
L’auteur
La Dr. Alice Holzhey est psychothérapeute reconnue par la Fédération et co-directrice du séminaire d’analyse du Dasein de Zurich (DaS). Elle pratique depuis 1976 dans son propre cabinet à Zurich et exerce en outre en tant que professeur et superviseuse. Elle a rédigé de nombreuses publications relatives à la Daseinsanalyse. Depuis 1991, elle est présidente de la Gesellschaft für hermeneutische Anthropologie und Daseinsanalyse (GAD).
Contact
E-Mail : alice.holzhey@bluewin.ch
1 À ce sujet en français : A. Holzhey-Kunz : Introduction à la Daseinsanalyse. Un regard existential sur la souffrance psychique et sa thérapie. Préface de Thomas Fuchs, traduit par Laurence Defago : Le Cercle Herméneutique. Librairie Philosophique Vrin, Paris 2016.