Le traitement des rêves dans la psychothérapie jungienne

Verena Kast

Psychotherapie-Wissenschaft 11 (2) 2021 19–20

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CC BY-NC-ND

https://doi.org/10.30820/1664-9583-2021-2-19

Mots clés : rêve diurne, rêve nocturne, espace d’imagination, étendue des possibilités, schémas relationnels

Le travail sur les rêves est une compétence centrale et une technique importante de la psychothérapie jungienne, une orientation psychanalytique-psychodynamique de base en psychothérapie. Pour C. G. Jung, les rêves étaient une source d’inspiration, pour lui-même, mais aussi pour son travail avec les patients. Selon Jung, les impulsions essentielles du développement proviennent de l’inconscient sous la forme de rêves, d’images, d’imaginations et d’idées.

Lorsque l’on ne sait plus quoi faire, lorsque la vie n’a plus de sens, les ressources de la conscience sont épuisées, selon Jung, et il est donc utile de se tourner vers les expressions de l’inconscient, vers les rêves, les imaginations, les images, grâce auxquelles la stagnation psychique peut se dissoudre.

Dans la compréhension des rêves par Jung, deux théories des rêves sont décrites. La première affirme que le complexe, c’est-à-dire les schémas relationnels dysfonctionnels internalisés et stressés sur le plan émotionnel, provoquent les rêves. En d’autres termes, les problèmes émotionnels déclenchent les rêves, mais ils sont également évacués dans les rêves, et les modèles de relations et de comportements rigides qui leur sont associés sont modifiés. La deuxième théorie du rêve de Jung est celle de la compensation : les rêves compensent l’attitude et la posture conscientes, ils peuvent donc donner des indices sur ce qui est trop mis de côté dans la vie et amorcer un nouveau développement.

Les deux théories ne se contredisent pas. La théorie des complexes se concentre davantage sur les problèmes et leur résolution, la théorie de la compensation sur l’activation des ressources et la clarification des motivations. L’approche finale de Jung à l’égard du rêve est liée aux deux théories du rêve : ce n’est pas tant la raison pour laquelle une personne fait ce rêve particulier qui est intéressante, mais plutôt les nouveautés que le rêve apporte, les incitations au développement qu’il fournit.

Une autre particularité de la compréhension des rêves par Jung est la signification du rêve au niveau du sujet : toutes les figures qui apparaissent dans le rêve doivent également être comprises comme des aspects de la personnalité de la personne qui rêve. Ainsi, les schémas relationnels dysfonctionnels décrits dans les rêves peuvent être transférés aux relations en général, y compris la relation thérapeutique, mais ils peuvent aussi représenter des schémas relationnels intrapsychiques ; les personnages qui jouent le rôle peuvent être compris comme les propres traits de personnalité en interaction de la personne qui rêve. Cela ouvre une autre possibilité pour traiter les schémas relationnels dysfonctionnels et comprendre les comportements problématiques.

Jung a établi un lien entre le rêve diurne et le rêve nocturne en soulignant l’importance fondamentale du fantasme, de l’imagination. Les recherches sur le rêve éveillé, le vagabondage de l’esprit et la pensée autogénérée ont explosé ces dernières années. Les chercheurs se sont particulièrement intéressés à leurs liens avec les rêves pendant le sommeil, la créativité et les maladies mentales. De nombreuses études montrent que la rêverie est liée à une diminution de l’attention portée sur le monde extérieur. Les brèves interruptions de l’apport sensoriel externe pendant l’éveil conduisent à de brèves pensées spontanées ; la déconnexion beaucoup plus spectaculaire du monde extérieur que nous avons pendant le sommeil permet des chaînes de pensées plus intenses et beaucoup plus longues, ainsi qu’une immersion plus profonde dans ces pensées spontanées.

Si nous considérons les rêves diurnes et nocturnes comme un continuum, cela a également une influence sur le travail avec les rêves nocturnes. Non seulement nous pouvons travailler avec les personnes qui se souviennent de peu de rêves avec leur imagination et, si nécessaire, leur mise en forme, mais ce continuum nous incite également à laisser les rêves se raconter avec imagination, avec les émotions correspondantes et à laisser ainsi naître un champ de signification émotionnel, un espace de possibilité, qui permet de relier le rêve de manière globale à la vie actuelle et aussi à la situation thérapeutique et de rendre ainsi possibles de nouvelles expériences et de nouveaux comportements. Il est particulièrement utile de travailler sur les cauchemars avec l’imagination.

L’auteure

Prof. Dr. phil. Verena Kast est psychologue et psychothérapeute et a été professeure de psychologie anthropologique à l’Université de Zurich. Elle a une formation de thérapeute en psychanalyse jungienne, est analyste enseignante et directrice de l’Institut C. G. Jung de Zurich, Küsnacht, et s’implique de manière significative dans le programme de formation des directeurs/trices de cet institut.

Contact

Verena Kast
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